Plusieurs éléments contribuent à faire du film un objet abstrait, image mentale d'un monde irréel, archétype structurel et structuré d'un genre codé : le film de yakuza. Pour une fois, Suzuki, le virtuose de la couleur, choisit le noir et blanc, et joue plus sur le montage que sur le cadrage. Le son est comme toujours traité en post syncro, avec très peu d'ambiance, seuls les sons principaux sont réintroduits : des pas, de l'eau, des coups de feu. Les scène se déroulent souvent la nuit, et presque uniquement dans des appartements. L'ellipse règne en maitre, et Suzuki se permet des libertés incroyables, comme l'eau qui suit partout Misoko, ou des dialogues entre deux personnages distants de plusieurs dizaine de mètres. Il y a finalement très peu de scènes d'action, et le film se compose rapidement autour des deux temps forts : la relation avec Misoko et celle avec le tueur n°1. Les deux échappent à la logique narrative, le temps y est distendu, flou, tant Hanada semble perdu et à bout de forces. Mais ainsi, en se concentrant soudain sur des facteurs psychologiques concrets, Suzuki parvient à ré-humaniser son film, et à éviter les pièges de l'exercice de style.
Chaiev
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le 28 juin 2010

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Chaiev

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