La mort n'existe pas, réalisé par Félix Dufour-Laperrière, s’inscrit dans le registre du conte tragique, mêlant drame et philosophie. Le récit s’ouvre sur un attentat raté contre une riche demeure, où Hélène, une militante, s’enfuit au lieu d’agir avec ses compagnons. Rattrapée par le spectre de Manon, son amie et complice, elle est confrontée à une seconde chance : replonger dans la violence révolutionnaire ou rester figée dans l’inaction. Une errance psychologique s’installe, explorant le poids de l’engagement, des idéaux, de l’amitié et de la trahison.
L’animation constitue l’atout majeur de cette production. Le style visuel audacieux, dominé par deux ou trois teintes principales subtilement déclinées, crée une atmosphère unique, presque muséal. Les personnages, semblables à des statues de bronze traversées par la lumière, évoluent dans des décors qui semblent issus d’une nature morte mouvante. Ce paradoxe esthétique, froid et vivant à la fois, confère au film une identité visuelle forte. La direction artistique ne cherche pas la facilité : le choix de faire coexister abstraction et expressivité donne lieu à des compositions raffinées, parfois envoûtantes. Dans un cinéma d’auteur où la forme prend le pas sur le récit, ce parti pris visuel impose un regard singulier et remarquable.
L’ensemble de la production ne tient pas la promesse visuelle. Le postulat de départ, des jeunes qui commettent un attentat contre des puissants, repose sur des motivations floues, jamais clairement exposées. L’action semble davantage prétexte à une introspection pesante qu’à un réel enjeu dramatique. Hélène erre dans une culpabilité incarnée par des fantômes, dans un dispositif narratif répétitif et appuyé. Le film tente de traiter des thèmes lourds — la valeur de la vie, la responsabilité morale, les convictions politiques — mais le fait sans subtilité, à travers des scènes visuellement prévisibles et des idées rabâchées.
La gravité constante de l’ambiance, l’absence totale d’allègement, rendent le visionnage éprouvant. Il n’y a aucune respiration, aucun espoir, rien à quoi se raccrocher. Tout est sombre, glauque, voire dérangeant. Le malaise grandit à mesure que le film semble cautionner, en filigrane, l’acte terroriste au nom d’une fidélité aux idéaux personnels. Même si ce n’est pas affirmé, la mise en scène finit par entretenir une ambiguïté morale gênante, qui affaiblit le propos et brouille le message.
La mort n'existe pas échoue à transformer ses bonnes intentions en œuvre marquante. Ce n’est pas l’hermétisme du film qui dérange, mais sa dimension glauque, sa gravité jamais compensée, son traitement bancale de sujets brûlants. Il y a là une œuvre qui se veut audacieuse mais qui reste enfermée dans son dispositif, refermée sur elle-même.