La Nouvelle vie de Paul Sneijder par pierrick_D_

Paul Sneijder est un cadre sup français qui vit à Montréal.Il a autrefois quitté Toulouse et France Télécom pour se reconvertir dans le négoce du vin au Canada,se séparant en même temps de sa femme et de sa fille Marie pour refaire sa vie avec Anna,une secrétaire des Télécoms dont il a eu deux fils,maintenant ados.Mais il est arrivé un drame,Paul se trouvant dans l'ascenseur d'un hôtel dont les câbles ont lâché.La chute a provoqué la mort de tous les occupants,sauf la sienne.Il est un miraculé mais il se sent surtout maudit car Marie,venue lui rendre visite au pays des caribous et avec qui il voulait renouer pour rattraper le temps perdu,fait partie des victimes.Grièvement blessé,l'homme s'en est tiré et est sorti de l'hôpital,mais il est très marqué physiquement et mentalement.Il tire la patte,il boîte,et il déprime totalement.Ne s'occupant plus de rien,il ne veut pas reprendre son job ni entamer les démarches en vue d'un procès contre la compagnie d'ascenseurs qui s'annonce pourtant juteux en termes de dommages et intérêts.Il en a également marre de sa femme et de ses fils,très intéressés eux par cette manne financière.Passant ses journées à errer dans la ville,il finit par se présenter dans les locaux d'une société de promeneurs de chiens.Thomas Vincent,réalisateur et scénariste du film,n'a jamais rien fait de vraiment convaincant,tournant surtout pour la télé.Il adapte ici "Le cas Sneijder",un roman de l'écrivain Jean-Paul Dubois.Celui-ci,excellent auteur,s'est fait le chantre du blues de l'homme moderne vieillissant.On lui doit notamment "Kennedy et moi",porté à l'écran par Sam Karmann avec Jean-Pierre Bacri en vedette,et le très bon "Une vie française",qui n'a donné lieu qu'à un téléfilm."Sneijder" est une coproduction franco-canadienne,d'où la localisation à Montréal,dans laquelle est impliquée Téléfilm Canada,qui a aussi coproduit "Un sac de billes".Au début,on se dit que ce dépaysement,on patauge dans la neige, est le seul intérêt de ce drame languissant dans lequel il ne se passe à peu près rien et où l'on suit les déambulations molles d'un type mutique et hermétique au Monde.Puis progressivement,au fil de l'évolution du personnage et de ses rencontres insolites,un charme insidieux opère.Adapter Dubois n'est pas simple,la réflexion introspective primant largement sur l'action dans ses livres.On retrouve cependant ici les fondamentaux de sa littérature,des éléments présents dans la plupart de ses bouquins,comme "Une vie française".Un mec au bout du rouleau qui s'appelle Paul,une vie conjugale déliquescente avec une épouse adultère nommée Anna,un drame touchant leur fille Marie,la ville de Toulouse,dont Dubois est originaire,une reconversion professionnelle peu valorisante,un deuil terrible,un passage dans le milieu psychiatrique,beaucoup de points communs unissent les deux oeuvres.Sur le fond,on a affaire à une histoire nihiliste traitant de dépression,de culpabilité et de désespoir.Paul en arrive à ce fameux carrefour des illusions et de la réalité,ce moment où il prend conscience qu'il a raté cette vie qu'il croyait avoir si bien menée,et que de toute façon tout n'est qu'un mirage avec la mort au bout.Certes,son accident l'aide grandement à développer cette lucidité nouvelle et à évaluer les vraies et les fausses valeurs.Il a fait ce que font beaucoup de mecs,laissant tomber sa femme pour une plus jeune,abandonnant ses parents et sa fille que son arriviste de deuxième épouse ne voulait pas voir.C'est juste un type ordinaire,lâche et ne voulant pas de problèmes avec sa gonzesse,qui a laissé filer les choses au fil du temps.Ironie du sort,c'est quand il a décidé,tardivement,de reprendre la situation en main,que cette catastrophe improbable est survenue,sonnant le glas de cette amélioration de lui-même qu'il ambitionnait.Du coup,il n'en a plus rien à foutre et se réfugie dans la compagnie des chiens,des êtres nettement plus affectueux et moins compliqués que les humains.Mais sa nana est une coriace qui n'entend pas renoncer au fric promis,et c'est là qu'intervient un autre sujet du script,celui de l'internement abusif.C'est marrant,on nous raconte toujours que la médecine psy est un domaine en crise,qu'il n'y a plus d'argent et plus de place dans les hôpitaux,au point qu'on laisse tout un tas de fadas extrêmement dangereux se balader dans les rues en liberté,mais quand il s'agit de contentieux familiaux avec du gros pognon à la clé,là de la place se libère illico.C'est comme le budget de l'Etat,il n'y a plus que des dettes et les moyens sont absents,mais ça dépend pour quoi.C'est un Thierry Lhermitte très vieilli et en piteux état qui mène la danse avec un talent sûr,alors que Géraldine Pailhas,miss Botox,est détestable à souhait en salope avide.Leurs enfants sont joués par deux vrais frères,Aliocha et Vassili Schneider,membres d'une importante fratrie d'acteurs dont le plus connu est Niels.Pierre Curzi ,une des vedettes des films d'Arcand comme "Le déclin de l'Empire américain" ou "Les invasions barbares",est lui aussi très abîmé par le temps mais ses qualités de comédien sont intactes et il campe magistralement un avocat plus humain que prévu.Le gros Guillaume Cyr est au top en patron des promeneurs de chiens obsédé par les chiffres,lui qui avait débuté au cinéma en France dans "Nos jours heureux".Les toutous sont formidables,surtout la golden retriever Charlie,adorable bestiole.Note et critique de film de Thomas Vincent publiées précédemment:"Le nouveau protocole"-2.Moyenne:4.