31 octobre 1963, à Haddonfield, Michael Myers âgé alors de huit ans assassine à grands coups de couteau sa soeur Judith. Interné ensuite dans un asile psychiatrique et confié aux bons soins du docteur Loomis, il finira par s'échapper lors d'une nuit d'orage 15 ans après. Le Dr Loomis persuadé que Myers revient sur les lieux de son crime le suit jusqu'à Haddonfield où un groupe de jeunes lycéens s'apprêtent à fêter Halloween. Tous, sauf Laurie Strode, de "corvée" de babysitting.


Même au bout d'une vingtaine de visions, Halloween n'a rien perdu de sa force. Initialement intitulé "The Baby Sitter's murders", le script ressemble à un polar de plus, mais c'est compter sans la volonté de Carpenter de faire ses premiers pas dans le cinéma d'épouvante. Et, pour cela rien de tel que de choisir comme interprête de l'héroîne, la fille de Janet Leigh -qui a déjà fais les frais du premier grand film de sérial-killer dans Psychose- : Jamie Lee Curtis. Car les filiations avec le film du grand Hitchcock sont évidentes (même thème, volonté de surprendre le spectateur), au point que le nom de Loomis est tiré de "Psychose" (tiens, tiens, Wes Craven le réutilisera pour son Scream). Mais, plutôt que de plagier ce qui a déjà été fait, Carpenter fait de Michael Myers un tueur muet à la démarche mécanique, ce qui le rend inquiétant car ainsi on ne dévoile rien de ses motivations.


Faisant preuve d'une grande imagination en matière de mise en scène, il maitrise à la perfection l'art de la peur en nous plongeant d'emblée dans un cauchemar. Ainsi, dès le départ, on assiste au meurtre de Judith au travers des yeux du meurtrier. Pour accompagner les forfaits du croquemitaine, Carpenter compose certainement ce qui est à ce jour sa plus grande musique, identifiable dès les premières notes. Et pourtant guère recherchée, elle est d'une efficacité redoutable. L'intrigue repose sur la peur de voir disparaître les uns après les autres les personnages, non dans un déluge de sang (car La nuit des masques est tout sauf un film gore), mais plutôt dans grâce au suspense qui jamais ne faiblit. On est aidé par des comédiens sobres qui ne se lancent pas dans des vannes lourdingues ni dans un humour second degré souvent pénible (on remarquera juste un clin d'oeil à "The Thing" d'un autre monde (1951), que des personnages regardent à la télé le soir d'Halloween, que Carpenter revisitera dans "The Thing" quelques années plus tard). Bien que leurs comportements peuvent paraître futiles, leur réaction colle parfaitement à la réalité des faits. Et on n'est est pas à parler alors de ces clichés comme les personnages stéréotypés (blonde pulpeuse souvent prompte pout être désignée à la vindicte du tueur, fausses peurs, jeunes insouciants, être vierge protège de la Mort...) car Carpenter tient plus à denoncer les méfaits du puritanisme qu'à vouloir jouer les moralisateurs (ce n'est pas son style). Le vétéran Donald Pleasence épaule une kyrielle de jeunes acteurs plus ou moins débutants, en traquant sans cesse Michael Myers, comme s'il devait de faire pardonner son évasion... Une quête qui ne prendra jamais fin.


Récompensé à son époque par le prix de la critique au Festival d'Avoriaz, le prix d'interprétation fénimine et le Grand Prix du public au Festival du Film Fantastique et de Science-Fiction de Paris, Halloween, connaît alors un succès foudroyant (plus de 75 millions de $ pour un budget très restreint). Et lance le début d'une déferlante de slashers (dont le meilleur descendant aura été Vendredi 13, qui se démarquera ingénieusement grâce à ses meurtres sanglants). Quant à connaître les motifs qui poussèrent Michael Myers à s'en prendre à Laurie Strode, il faudra attendre sa suite sobrement intitulé Halloween 2, réalisé par Rick Rosenthal en 1981. Indémodable chef d'oeuvre de l'épouvante, le premier "Halloween" reste la référence jamais égalé du slasher. Laissons pour finir la parole à Stephen King, qui définit le mieux ce qu'est le film: "Il était une fois trois baby-sitters qui décidèrent de sortir pendant la nuit d'Halloween, et une seule d'entre elles était encore vivante lorsque vint le jour de la Toussaint". En somme un conte initiatique symbolisant le passage de l'enfance à l'âge adulte.


Clin D'œil :
A noter que c'est le réalisateur Nick Castle ("T.A.G.", "Starfighter", "The Boy Who Could Fly"), qui interprète Michael Myers dans ce premier film, sous sa forme masquée.


Le masque du tueur dans "Halloween: La Nuit des Masques" est en fait le visage de... William Shatner ! Enfin, une copie de celui-ci. L'équipe de production du film a trouvé un masque du Capitaine Kirk dans une boutique de déguisements et l'a tout simplement peint en blanc.


Le rôle du docteur Sam Loomis a d'abord été proposé à Peter Cushing et Christopher Lee, qui l'ont tout deux refusé en raison du maigre salaire. Plus tard, Lee regrettra sa décision et dira que ce fut la « plus grande erreur de toute sa carrière ». Donald Pleasence, troisième choix de Carpenter, accepta tout de suite sur le vif conseil de sa propre fille qui avait beaucoup aimé "Assaut" (1976) lors de sa diffusion en Grande-Bretagne.


Dans une interview, Carpenter admet que « Jamie Lee n'était pas le premier choix pour Laurie. Je ne savais pas qui elle était ». Le réalisateur voulait Anne Lockhart, la fille de June Lockhart.
Cependant, l'actrice avait d'autres projets et ne pouvait pas participer au tournage. Debra Hill suggéra Jamie Lee car elle était la fille de la star Janet Leigh, « je savais que Jamie Lee Curtis attirerait le public parce que sa mère est l'héroïne de Psychose. ». Halloween lança ainsi la carrière de la jeune actrice, qui tournait ici son premier film.


Il existe plusieurs versions de "Halloween: La Nuit des Masques" aujourd'hui. L'originale, d'une durée de 91 minutes, est la plus largement connue. La version remastérisée pour la télévision, sortie en 1980 et qui fut diffusée sur la chaîne NBC, dure 101 minutes.
Les scènes coupées de l'original furent incluses dans cette version. Elle est sortie en DVD sous le titre Halloween - Version Longue, en 2001.
En 1998, pour le 20e anniversaire du film, la version sonore a été modifiée, avec l'approbation de John Carpenter. La version existe en VHS et DVD.

Créée

le 17 sept. 2019

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Blockhead

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