Peut-être que pour d'aucuns, je suis généreux sur ma notation, mais j'assume. Peut-être aussi que j'aurais pu mettre moins que 6, s'il m'avait fallu être totalement froid et chirurgical, mais, mais, mais...
C'était sans compter sur mon cœur battant, celui-là même qui a une tendresse infinie pour Daisy Edgar-Jones depuis Normal People, celui-là qui a pris le parti de fermer les yeux sur les passages contemplatifs faciles et déjà vus, sur les dialogues pas assez poussés, sur les personnages qui manquent d'originalité (oserais-je dire de profondeur), sur le manichéisme bien trop présent tout au long du film pour se concentrer sur ce qui, parfois, doit primer : l'émotion.
Alors oui, on a vu mieux dans le registre histoire d'amour...
Oui, on a fait mieux quand il s'agit de dépeindre l'intolérance, la solitude, la tristesse, l'injustice.
Oui, on a déjà mieux filmé la nature que dans Là où chantent les écrevisses, mais...
Mais Kya (Daisy Edgar-Jones) ne joue-t-elle pas parfaitement son rôle d'enfant sauvage et craintive abîmée par la vie ?
Cette histoire d'amour, qui n'a rien d'original sur le papier, ne fonctionne-t-elle pas quand même si on accepte de faire valser sa casquette de critique en herbe ?
Les injustices dont Kya est victime, la solitude qu'elle exprime, la peur quand elle survient, tout ça, n'est-il pas rendu comme il doit l'être ? Moi, je dis que si. Je le dis et l'assume.
Et même si, parfois, on a l'impression qu'il s'agit d'une petite comédie romantique américaine (améliorée) qui aurait pu passer sur M6 à l'heure du déjeuner, je dois dire que quelque chose m'a tenu en haleine, que j'ai eu un sursaut d'empathie immense pour tout ce que ce film raconte et que je pourrais même le conseiller à quelques personnes.
Il y a quelque chose de chaleureux dans ce film, quelque chose de réconfortant, comme un chocolat chaud en plein hiver.
On en a déjà bu plein des chocolats chauds, on a déjà vécus mille hivers, on le connaît parfaitement, ce plaid tout épais dans lequel on vient s'emmitoufler en poussant des petits cris de joie à mesure que notre corps de détend, enlacé par la chaleur nouvelle.
On sait tout ça, mais est-ce qu'on s'en priverait pour autant ? Non.
Là où chantent les écrevisses, c'est ça, d'une certaine façon : un plaisir légitime ou au pire coupable, mais un plaisir malgré tout.
Je le place parmi les films que je ne juge pas par leur qualité (et détrompez-vous, il en a !), par leur technicité, par leur savoir-faire cinématographique, par leur invention ou par leur audace.
Je l'ajoute à la liste des œuvres qui veulent nous raconter une histoire sans trop de fioritures et stimuler notre empathie parce que parfois, ça suffit.
Là où chantent les écrevisses, c'est un 6 de raison, mais un 7 de cœur qui bat la chamade.