Ce que Truffaut réussit ici, c'est à nous plonger dans la vie d'un homme qui bascule par un coup de foudre, une rencontre d'une banalité extrême dans un avion. J'ai été immédiatement captivé par Jean Desailly dans le rôle de Pierre Lachenay, cet intellectuel bien sous tous rapports dont le monde ordonné se déchire. La tension est palpable dès le départ, une tension sourde qui annonce l'inéluctable.
- L'idylle avec Nicole (Françoise Dorléac, d'une grâce et d'une modernité folles) est filmée avec une sensualité et une urgence qui m'ont vraiment touché. On sent la clandestinité, la joie simple et fragile des instants volés.
- Cependant, c'est justement cette extrême banalité de l'adultère qui, parfois, me laisse un peu sur ma faim. Le film est d'une simplicité narrative presque clinique. J'ai ressenti un certain manque d'empathie pour Pierre. Il semble juste se laisser porter par les événements, l'homme pressé et un peu lâche typique, pris entre une épouse passionnée (Nelly Benedetti, formidablement volcanique) et une maîtresse insaisissable.
- Le génie de Truffaut, c'est cette mise en scène hitchcockienne, sobre mais implacable. Les scènes du week-end à Reims sont un modèle de malaise et d'incommunicabilité. Je me suis senti mal à l'aise, voyeur de leur échec annoncé. La fin, brutale et inattendue, m'a rappelé que sous la "peau douce" de cette romance adultère se cache un drame implacable. Elle n'est pas "morale" ; elle est juste la conséquence tragique et logique de l'irresponsabilité.
En conclusion, c'est un film troublant, moderne et magnifiquement interprété, notamment par un trio d'acteurs au sommet. Il pêche un peu, à mes yeux, par la froideur de son héros et la sécheresse de son exécution, mais il reste un grand moment de cinéma sur l'amour, le temps qui passe, et la défaite face aux sentiments.