Hart est une nouvelle fois co-auteur (et forcément interprète) pour un scénario qui parvient à contourner brillamment un certain nombres de clichés. A commencer par celui (très en vogue à l'époque et pour les années à suivre) du criminel qui va rentrer dans le droit chemin par amour pour son amoureuse, pure et noble. Ici, les choses sont un peu plus compliquées, ce qui permet d'étoffer et de nuancer profondément le couple vedette pour une psychologie fouillée et réaliste pour une vision de l'ouest assez pessimiste et fataliste où l'innocence semble ne plus exister, contrariant le(s) désir(s) de rédemption.


Rien que pour ses personnages et sa construction dramatique très habile, la révélation surprend par sa maturité et sa justesse. Mais la réalisation n'est pas en reste avec des idées qui épousent admirablement le contenu de son histoire et des vibrations des protagonistes. La encore, Hart ne choisit pas la facilité en optant pour une poésie rurale où la grandeur d'âme trouverait écho dans la beauté des paysages. Au contraire, car si la première partie reste assez traditionnel dans son premier tiers, le reste prend totalement à rebours les conventions, que ce soit dans le caractère du rôle féminin et le cadre même de son histoire. L'histoire se délocalise ainsi à San-Francisco de 1915, entre rades malfamés, escrocs en tous genres, entraîneuses qui contrebalancent avec bateaux majestueux, les longues rues et les demeures bourgeoises.
Ce voyage ne sera pas sans incidence lors du retour où plus rien ne peut désormais être comme avant ; d'où une symétrie narrative reprenant les éléments de la première partie (retrouvailles dans la ville, course poursuite et vie de hors-la-loi) mais en supprimant le folklore typiquement "western". A ce titre la promesse d'amour ne se fait dans une nature idyllique mais dans une ruelle sordide, complétement bouchée par des palissades. C'est également une manière de se focaliser sur les personnages et leurs émotions, généralement très bien campés par les comédiens (à quelques rares geste près, un peu trop théâtraux)
Un choix de réalisation très juste comme le découpage dans le bar où la notion de l'espace est malmenée pour traduire la perte de repère de William S Hart suite à la "révélation" qu'il vient d'avoir. A noter d'ailleurs que le combat qui s'en suit et d'une grande violence et âpreté pour son époque. On sent vraiment le goût du sang dans la bouche et la fatigue du héros.


Que ce soit dans ses quelques séquences d'actions, ses moments intimes et dramatiques ou lors du dilemme moral lors de la course final, the narrow trail possède une réelle intensité qui fait que les 70 minutes passent trop vite.

anthonyplu
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le 4 janv. 2017

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