On suit Bourdieu dans son quotidien : interviews par des journalistes espagnoles sur le féminisme ; rencontre avec Gunther Grass, intervention dans la salle lépreuse d'une fac défavorisée, rencontre avec une sociologue belge en déprime faute de financement, ouverture du courrier avec une secrétaire taquine, réception d'un message cryptique de Jean-Luc Godard, leçon au collège de France, entretien avec un thésard qui tarde à publier.
Pierre Carles s'attarde sur de petits détails signifiants, le geste de rassembler ses feuilles, le sourire affable, le fait de se mettre dans le coin d'un hall pour annoter une feuille.
On conclue sur une séquence forte, où l'on voit Bourdieu venu à la maison de la culture au Val-Fourré se faire prendre à parti par un éducateur désabusé et arriver à retourner la situation pour installer un embryon de dialogue.
On apprend à aimer les mimiques du personnage, sa manière de ponctuer ses discours de "bon", de "et caetera", de "moi je dis souvent".
La caméra filme comme un personnage présent qui épie. Le son est souvent mauvais. Mais ce n'est pas brut, tout est calculé. C'est la manière de faire de Carles. Elle n'est pas neutre, et en cela elle est honnête. Elle reste quand même un peu au ras de son matériau, on aurait aimé davantage d'intéractions.