Le début laisse redouter un Ford tombant dans son propre folklore, n’ayant d’autre motif à faire le film qu’à empiler les scènes de baston se terminant en beuverie (ou l’inverse) et y placer ses polissonneries de vieillard indigne, tout cela fort sympathique mais à l’intérêt tout de même limité.
Heureusement il n’en est rien et passé le premier quart d’heure centré sur le Duke et son pote de castagne (incarné par Lee Marvin), la véritable histoire démarre. Une histoire fordienne en diable qui rappelle ses grands films d’intégration (je pense notamment à Rio Grande) avec un père, une fille, une distance à combler, des rites à accomplir. Le tout mêlé d’imbroglios, d’une histoire d’amour mouvementée qui rappelle celle de "L’Homme tranquille", de personnages au sein d’une communauté (la prostituée au grand cœur, le richard veule mais bon bougre, le curé…).
Le folklore revient du côté de la description des polynésiens et des asiatiques présents sur l’île. Une certaine tendance raciste apparaît, en particulier dans une scène où des chinois s’acharnent sur un faux juke-box.
Mais cette tendance se renverse, puisque l’histoire est tout de même centrée sur un enjeu de reconnaissance d’enfants issus d’une union mixte. Ce retournement est à l’image du film, se plaisant à construire les relations dans un démontage des apparences. En témoigne le personnage d’Elisabeth Allen qui apparaît en incarnation de la puritaine bostonienne, et qui révèle (après être tombée à l’eau, rite d’accueil également des plus fordiens) une personnalité entièrement à l’opposé (on a droit à l’occasion à une scène dévoilant la plus belle paire de jambes nues que j’ai pu voir à l’écran).
On a également une très belle scène de célébration de Noël, avec chants, rois mages et pluie traversant le toit percé.
Au final un film attachant, moins léger que son ambition avouée ne le laisse penser, qui sait transcender ses défauts pour livrer un bon résumé de la vision fordienne, toute en générosité et irrévérence.
Artobal
7
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le 18 mars 2013

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Artobal

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