La Trotteuse
6.1
La Trotteuse

Court-métrage (2014)

Y a des bonnes idées dans ce court-métrages, ça c'est indéniable (que ce soit inspiré d'autres films ou pas, là n'est pas la question) ; mais il y a aussi et surtout des mauvaises idées. C'est dommage.


Je me souviens qu'un jour, un copain m'a fait remarqué que 90% des films étudiants/premiers films/ films d'amateur commencent par un mec qui se réveille. Et c'est vrai. Et ce qui est encore plus vrai c'est qu'une grande majorité des courts amateurs commençant ainsi sont mauvais.


Le scénario part d'une idée déjà vue, mais toujours intéressante. L'élément perturbateur arrive tardivement et déçoit parce qu'il n'est pas exceptionnel (casser un verre peut arriver à n'importe qui, je ne vois pas en quoi c'est suffisant pour casser une routine) ; il aurait fallu pousser cela plus loin (une blessure en ramassant, ou bien trouver une raison plus forte pour que le verre tombe ? y a bien cette musique que le personnage semble entendre, mais je ne suis pas bien sûr de comprendre les intentions et je vois encore moins le rapport avec le reste).


Ensuite vient le changement et là aussi c'est assez maladroit : le changement de t shirt était-il bien nécessaire ? Cela paraît juste un peu facile comme symptôme du changement : le personnage sait qu'il doit travailler et qu'il doit être présentable, le changement de t-shirt n'amène absolument rien par rapport au planning précis ; d'ailleurs on imagine très bien que ces petits trotteurs n'ont qu'un seul type de vêtement, une chemise, et rien d'autre. Par conséquent il aurait été plus logique (et plus subtil) de se contenter d'une chemise mal mise, au col ouvert par exemple.


Puis vient le pétage de plombs qui me paraît un peu brutal vu qu'il n'y a pas d'évolution ni de travail pour mener à un tel accès de fureur (il aurait été utile de voir le personnage s'énerver petit à petit, tester des micro-solutions inutiles avant de passer à un tel extrême. Enfin, la conclusion est interrompue par un aspect méta toujours trop facile en terme de narration et qui permet de ne pas finir le film réellement (en même temps, comment finir un truc pareil ? il s'enfuit et court tout nu dans les champs ? ou bien il retourne travailler gentiment ? c'est la faute à un manque d'objectif principal).


Il y a aussi ce pouvoir de la trotteuse : ce pouvoir semble venir de nulle part (ce n'est pas parce que l'on est régi par une horloge que celle-ci peut faire des retours en arrière quand on ne fait pas les choses bien) ; en fait, ce pouvoir, il aurait fallu l'introduire plus tôt, par exemple lorsque l'un des collègues meurent ou via un accéléré lors de certaines scènes de répétition ou que sais-je ?


Globalement je pense que le scénario aurait pu être poussé plus loin, que le sujet n'est jamais qu'effleuré. L'élement perturbateur est trop faible, les conséquences trop molles et la crise mal amenée.


Côté mise en scène, je reproche en premier lieu une très mauvaise lumière. C'est parfois mal lisible, c'est même moche par moment. Mais il y a aussi quelques plans sympathiques. Le format de départ est intéressant. Le changement de format l'est beaucoup moins (autant narrativement que formellement).


Le montage est globalement mou. Beaucoup de plans auraient pu être raccourcis, surtout lorsqu'il s'agit de répéter l'action pour montrer la routine (le réalisateur ne compte pas assez sur l'intelligence de ses spectateurs ; il aurait pu raccourcir, ellipser certaines actions sans que cela ne dérange puisque le spectateur comprend très vite que c'est le quotidien de ces jeunes gens). Certains plans sont carrément inutiles aussi, et donc certaines actions inutilement surdécoupées (comme quand il va chercher le balais, surtout qu'en parallèle les autres retournent travailler : c'est assez brouillon en fait, on devine ce qu'il se passe parce qu'on n'est pas con mais on ne le voit pas bien). Je noterai tout de même le fondu au noir qui fonctionne, chose assez rare pour moi : la raison est que l'image est relayée par un jeu sur le son. Les bruitages sont d'ailleurs intéressants, dommage que ce ne soit pas toujours super bien mixé. Pareil pour l'image qui parait bien cheap dès que la caméra se met à bouger. Le changement de couleur apparaît très vite comme ringard car vraiment trop facile pour exprimer l'idée. Le changement de ton dans la chanson aussi : le côté métal est très enfantin, surtout que pendant que la caméra bouge et que le son est monté à fond, il ne se passe plus rien narrativement, alors que c'est justement le moment le plus important du film au niveau de la narration (et ce sera d'autant plus gâché par le côté méta).


Les acteurs sont un peu trop jeunes. J'imagine le film fait entre copains. Il aurait été plus pertinent de choisir parmi une tranche allant de 20 à 35 ans (the golden age), cela aurait été plus crédible (et pourquoi pas jouer sur la défaillance justement quand on vieillit trop ?). De plus, les acteurs sont plutôt mauvais (la première crise contre le mur).


Bref, c'est long par ce côté répétitif mal géré mais aussi par un traitement nul du sujet qui aurait pu être poussé plus loin. Il reste quelques fulgurances ici et là, mais pas assez pour sauver le film et surtout sauver le spectateur de l'ennui. Dommage.

Fatpooper
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le 7 août 2015

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Fatpooper

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