En préambule, je tiens à dire que j’aime Frank Capra d’amour.
En plus de vingt ans de cinéphilie boulimique, Capra est l’une des deux seules personnes à avoir transpercé la cuirasse et tiré la larmichette au cœur de pierre tristement insensible que je suis. Le seul, avec la belle Gene Tierney, c’est vous dire si le gaillard est habile…


D’ailleurs, en 1936, Frank a offert à l’humanité son plus beau présent, sorte de cadeau de Noël en avance pour les dix mille ans à venir. Avec la plus grande douceur, la plus subtile alchimie entre le rire et les larmes, et surtout, le plus grand amour pour ses personnages et son public, Capra réalise l’un des plus beaux films de l’histoire du cinéma, sorte de miracle comme il ne s’en produit que trop rarement.


Vous l’aurez compris, je parle évidemment de l’Extravagant Mr Deeds, chef d’œuvre indépassable qui mériterait largement sa place dans n’importe quel top 10 et que je laisse – il s’agit pour moi d'un terrible crève-cœur ! – si injustement en 11e position de mon propre classement.


Indépassable, c’est le mot, et, hélas, mille fois hélas, même Frank s’y est laissé prendre !


J’ai toujours eu du mal avec les espèces de remake qui ont suivi. La fraîcheur et le génie du modèle ont laissé place à une recherche sans âme de la perfection technique ; à une tentative aussi vaine qu’artificielle d’égaler l’inégalable !


Et alors, tout ce qui élevait le premier film au rang de merveille a le don de m’agacer prodigieusement chez l’héritier spirituel de 1946. La vivacité primesautière de Longfellow Deeds a laissé place à l’abattement de George Bailey, l’homme qui abandonne plus vite que son ombre ! La confiance de Capra en son prochain, ce naïf, mais touchant espoir, que tout individu recèle une parcelle d’humanité et de bonté, prête à surgir dans un instant de vraie solidarité, transparaissait dans chaque plan de Mr Deeds avec une sincérité incroyable. Dans la vie est belle, tout paraît trop forcé, trop artificiel, trop tout… Et à force de vouloir, coûte que coûte, matraquer un message, celui-ci perd diablement en intérêt.
En outre, un tel film, d’une telle niaiserie, ne peut fonctionner qu’avec une bonne dose d’humour. La vie est belle n’est pas drôle. La vie est belle est lourdingue, et les anges m’emmerdent.

Regan
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le 16 sept. 2016

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Regan

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