Comment prouver aux plus réticents qu'avec deux bouts de ficelle, des ambiances soignées et un coup d'oeil adroit, il est possible de générer une petite tension horrifique qui fonctionne. Avec Le carnaval des âmes, Herk Harvey délivre une belle proposition fantastique, qui fleure bon l'expérimentation visuelle et la soif d'entreprendre quelque chose de nouveau. On y sent un réel effort pour appréhender visuellement des phénomènes inexplicables, des situations surréalistes tout en les rattachant suffisamment au réel pour composer une fable fantastique au sens premier du terme. Réflexion sur le refus du trépas, sur la définition même du concept de l'âme, le carnaval des âmes est avant tout un petit film de genre qui, sans avoir l'air d'y toucher, surprend par sa capacité à générer de la tension, avec peu de moyens.


Et si le film a un peu perdu de son éclat, c'est davantage parce que son matériau a été réutilisé en masse au cinéma par la suite, ce qui nous fait anticiper la fin un peu trop rapidement, que parce que ses images semblent dépassées. Car d'un point de vue formel, le film de Herk Harvey fait belle impression. Il est animé par une photographie on ne peut plus soignée, passée maître au jeu subtil du clair-obscur. Les maquillages qui s'apposent sur les visages des âmes vagabondes apportent une belle touche d'onirisme à l'ensemble et une identité visuelle forte, nécessaire pour rendre ce visage qui hante la jolie Candace Hilligoss suffisamment inquiétant.


Même s'il est sans surprise, un peu agaçant par le jeu de certains de ses acteurs (le lourdeau voisin ou le toubib, très théâtraux), il y a dans la proposition de Herk Harvey une telle implication qu'on ne peut qu'adhérer à l'exercice de style qu'il propose. Tourné en à peine trois semaines, avec un budget riquiqui, et pour seules armes, l'idée qu'il avait en tête — idée qui s'est imposée à l'esprit du réalisateur alors qu'il se promenait aux alentours de cette salle de bal désaffectée et hyper glauque que l'on voit à plusieurs reprises dans le film — et un peu de débrouille, le Carnaval des âmes est un tour de force qui inspire le respect, même s'il peine un petit peu, aujourd'hui, à convaincre totalement.

oso
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le 12 août 2014

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