En 1970, ce qu’on va bientôt appeler la Blaxploitation n’existe pas encore. Les mouvements afro-américains ont cependant déjà marqué l’actualité aux États-Unis et commencent à influencer le cinéma. Ce film en est l’exacte illustration. Deux têtes d’affiche noir dans une sorte de buddy-movie avant l’heure et un sujet qui reviendra en boucle dans le genre : la lutte entre les blancs et les noirs mais, surtout, la lutte entre les bons et les mauvais blacks. C’est tout à fait le sujet de ce film qui, très clairement, cherche ses marques durant tout son exercice. On n’est pas encore dans le polar urbain mais le tournage dans Harlem annonce ce cinéma ancré dans la réalité. L’intrigue policière est légère pour vraiment passionner (on a franchement l’impression d’une intrigue prétexte, telle qu’on peut en trouver dans de nombreuses séries télé). Mais, surtout, le ton du film hésite entre le polar sérieux et le second degré, ce qui nuit globalement à l’ensemble.
Pour partie polar de série et pour partie parodie, le film rate sa cible car, et c’est dommage, il avait des choses à raconter. On prend le discours quand même mais on ne sait pas toujours si c’est du lard ou du cochon. La musique elle-même participe à ce brouillage. Dans les scènes d’action (qui sont assez peu nombreuses mais parfois rudement efficaces), une musique aux accents humoristiques vient se télescoper aux images. C’est exactement ce qui se passe lorsqu’une chouette course-poursuite en voitures est lancée au début du film. Ce n’est pas encore l’avènement de la soul musique dans ce type de films et le choix de la partition détonne et démine la tension de la séquence : dommage. À la fois plaisantins et flics à la gâchette facile, notre duo principal traverse lui aussi ce film avec une impression mitigée.
Le résultat n’est pas mauvais, mais très maladroit. De bonnes intentions côtoient des personnages ou des séquences décalés, et, surtout, le film ne va pas au bout de ses véritables intentions. Mais il a pour lui d’annoncer un certain cinéma encore en gestation qui ne sait pas encore tout à fait sur quel pied danser. Le genre qui envahira les écrans un an plus tard sera beaucoup plus premier degré, un peu fanfaron même, mais aussi plus percutant et violent. La découverte de ce film n’en est que plus intéressante pour comprendre comment la Blaxploitation a vu le jour.