Entre Bambi et Cendrillon, soit huit longues années tout de même, les studios Disney laissent de côté les longs métrages et ne sortent que des pot-pourris plus ou moins indigestes de courts et moyens métrages vaguement reliés entre eux par un fil conducteur... Du coup, on ne peut pas dire que les années quarante soient dans le domaine d'une grande richesse, parce que ce format ne fonctionne tout simplement pas, préfigurant en fait la qualité télévisuelle aux dépends d'une cohérence cinématographique.

Ici, c'est le dernier exemple de cette pratique douteuse, deux moyens-métrages : La mare aux grenouilles d'après Kenneth Graham et La Légende de la Vallée endormie d'après Washington Irving, soit deux classiques de la littérature enfantine anglo-saxonne des deux côtés de l'Atlantique... Pour essayer de mélanger tout ça, on prends deux narrateurs bien typés, Basil Rathbone et Bing Crosby et on se lance allègrement dans le massacre du Vent dans les saules et Sleepy Hollow.

Avec le recul, une adaptation par Disney de l'oeuvre géniale de Graham avait du sens, c'est d'ailleurs dès 1941 que le projet est lancé, pour une version de 50 minutes allègrement charcutée huit ans après pour mieux se combiner avec l'autre conte et on va dire que ce n'était pas l'idée du siècle. Déjà, les narrateurs donnent au film une touche assez molle, avec le côté "histoire lue aux enfants" qui abandonne ainsi une grande partie des capacités d'immersion propres au cinéma.
Avec ça, l'histoire insiste beaucoup trop sur le crapaud, personnage horripilant et ne compense pas assez avec ses amis qui sont normalement un contre-poids plus efficace, et ce sera bien pire avec le maître d'école, puisqu'il n'aura personne pour contre-balancer sa pénibilité, lui...

Alors c'est dommage parce qu'il y a quelque chose à sauver, surtout dans le Crapaud, malgré d'improbables scènes à la Tex Avery qui détonnent un peu, et une narration qui perd tout l'intérêt de l'oeuvre d'origine. Déjà, ça préfigure à la fois Basil détective, Le Noël de Mickey, Roger Rabbit et la Dernière croisade, ça ne peut pas être complètement mauvais... ensuite, il y a un reste de métier, certains plans magnifiques et même quelques rires qui se cachent ici et là...

Au final, je pardonne beaucoup, même si c'est un gâchis sans nom et que le résultat est affreusement mineur.

Je pardonne même le conte d'Halloween qui suit, malgré un héros insupportable et des forces démoniaques un peu effrayantes pour mon âme tendre, parce que, à un moment, il y a une scène de pique-nique qui inspirera fortement le merveilleux album de la Schtroumpfette, ce qui n'a pas de prix.

Et puis, c'est largement moins nul que le Burton, quand même.
Torpenn
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le 11 déc. 2012

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Torpenn

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