Alors qu’ils sont en visite dans un centre pour personnes handicapées, les jeunes Tyler Nilson et Michael Schwartz font la rencontre de Zack Gottsagen, un jeune homme atteint de trisomie 21 qui, dans la discussion, leur exprime son envie de devenir une star de cinéma. Touchés par son discours, et alors qu’ils n’ont que quelques courts métrages à leur actif, les deux jeunes réalisateurs décident de lui écrire un scénario, de lui donner le premier rôle, pour ce qui sera leur premier long métrage. Son nom, The Peanut Butter Falcon (Le Cri du Faucon par chez nous), un film méconnu du grand public mais qui pourtant est le film indépendant américain ayant rapporté le plus d’argent en 2019, générant 20M$ au box-office pour un budget de 6.2 sur le sol américain. Dans sa longue tournée des festivals, il a gagné pas moins de 20 prix, dont le Prix du Public au Festival du Film Américain de Deauville ou au SXSW. L’importante fondation Ruderman, qui milite pour le droit des personnes handicapées, lui a même décerné son Sceau pour sa représentation authentique et fidèle des personnes handicapées. Mais surtout, The Peanut Butter Falcon est un film bienveillant, un film qui fait chaud au cœur.


The Peanut Butter Falcon va mettre en scène deux acteurs qui ont eu leur part de controverse. D’un côté, nous avons Shia LaBeouf qui, après s’être fait connaitre grâce à Transformers, est un peu parti en cacahuète au point de ne plus être en odeur de sainteté à Hollywood, moqué sur Internet avec tout un tas de mèmes à son effigie. De l’autre, on retrouve Dakota Johnson connue surtout pour la trilogie Cinquante Nuance de Grey et toutes les polémiques qui ont suivi, mais aussi plus récemment pour avoir cassé du sucre sur le dos de catastrophique Madame Web dans lequel elle incarne pourtant le rôle principal. LaBeouf nous offre une excellente performance, toute en justesse, avec ce personnage à la dérive, froid, mais qui va malgré en apprendre sur lui et sur la vie de manière générale lorsqu’il va rencontrer quelqu’un de différent. Dakota Johnson, un peu plus en retrait, s’en sort également très bien avec un jeu à la fois réservé et impliqué, prouvant qu’elle aussi peut-être très juste quand elle s’en donne les moyens. Celui qui tire son épingle du jeu est clairement Zack Gottsagen, atteint du Syndrome de Down, qui donne tout son cœur pour une performance à la fois touchante, magnétique, mais aussi des plus rafraichissante. L’alchimie entre ce dernier et LeBeouf dans un premier temps, puis dans le trio lorsque Johnson se rajoute aux péripéties, est palpable, avec des échanges qui semblent sans cesse naturels même lorsqu’ils sont comiques. La relation de confiance qui est construite entre les personnages, un peu à la manière d’un conte ou d’une fable, est simple, délicate, et ils livrent clairement une de leur meilleure performance, si ce n’est LA meilleure. Chaque scène se regarde comme un petit bonbon sucré et on prend un réel plaisir à suivre les aventures de ces personnages à la dérive dans cet espèce de road movie tout doux dans lequel l’un essaie d’éviter une paire de voyous à qui il a fait perdre de l’argent, et l’autre s’est échappé de sa « clinique » dans l’espoir de devenir lutteur en s’entrainant dans une école dirigée par l’emblématique Salt Walker Redneck, un catcheur très connu des années 90.


La structure du film à la Telma et Louise fonctionne à merveille, bien qu’ici très peu de choses se passent au final sur la route. Lorsque les vies des protagonistes vont soudainement se retrouver liées et qu’ils vont trouver un réconfort dans la condition de l’autre (l’un est hanté par la mort de son frère, l’autre a été abandonné par sa famille), fuyant ainsi les réalités et les dangers pour se retrouver eux-mêmes, on est amené avec eux au milieu de ces paysages qu’on n’a pas l’habitude de voir dans le cinéma américain. Des champs de maïs, des marécages, des bayous, des rivières, un radeau de fortune, des bâtiments isolés aux habitants tout aussi touchants, mais surtout une sensation de liberté reflétant celle des personnages qui se lancent dans ce périple. La très belle photographie du film et le montage du film arrivent à capturer cette liberté, mais aussi le désespoir qu’ils portent en eux. Certains paysages sont magnifiques, d’autres simplement mystérieux, avec une nature sans cesse sauvage, loin de la civilisation. Cela créé une atmosphère à la fois étrange et poétique dans laquelle on est immédiatement embarqué. Oui, l’intrigue est parfois irréaliste pour les besoins de ce qui nous est raconté, mais elle est malgré tout amusante. Car nous sommes avant tout ici dans une comédie, une comédie dans laquelle on ne rit jamais aux éclats, mais dans laquelle on a le sourire aux lèvres du début à la fin. Et lorsque le final un peu trop abrupt arrive, on se dit qu’on aurait aimé que ça se poursuive car on s’est très rapidement attaché à ces personnages. Parce que cette ambiance musicale toute simple qui accompagne le film continue de nous résonner dans la tête. Parce que la simplicité et la sincérité de ce qu’on vient de voir fait un bien fou. Parce que les valeurs que porte le film, l’espoir, la famille ou encore la pureté, qui peuvent parfois sembler niaises aux yeux de certains, sont pourtant essentielles. Parce que The Peanut Butter Falcon est simplement un bon film.


Le cinéma indépendant américain regorge de petites pépites et après être tombé sous le charme de Dinner in America il y a quelques mois, c’est au tour du bienveillant et tout doux The Peanut Butter Falcon de faire son petit effet. Un film qui réchauffe le cœur.


Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-the-peanut-butter-falcon-de-tyler-nilson-et-michael-schwartz-2019/

cherycok
8
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le 11 avr. 2024

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