On le voit venir d'un peu loin, la thématique du jeune juge d'instruction idéaliste qui débarque dans une petite ville excentrée et qui va se retrouver confronté au bloc des notables qui ne voit pas d'un bon œil qu'on vienne farfouiller dans leurs affaires... Ce thème de l'intégrité face au pragmatisme est toutefois suffisamment fécond pour apprécier autant de films qu'il existera et qu'on découvrira sur le sujet, au gré des répétitions, et au final on juge davantage l'enveloppe (la mise en scène, l'interprétation, la formulation de la dialectique, etc.) que le contenu il me semble.


Un des grands problèmes dans "Le Dossier noir", c'est que pour incarner le protagoniste Jean-Marc Bory ne fait pas du tout l'affaire. Son air un peu naïf aurait très bien pu convenir au rôle du juge inexpérimenté, mais il aurait fallu beaucoup plus travailler sa progression psychologique — là on est sans doute un peu prisonnier du formalisme d'un certain cinéma français des années 50, y'a un peu le côté "qualité française" qui enfle.


André Cayatte est un ancien avocat, et on comprend que les thématiques judiciaires fassent partie de ses sujets de prédilection au cinéma. Dans la description de la communauté, dans l'établissement d'une tension et dans la mise en place de l'argumentaire Cayatte peut faire penser à Clouzot et Chabrol, voire même au Duvivier de "Panique" dans le portrait de cet homme isolé face à une communauté affairiste et ignorant des relations de compromissions qui les lient tous. J'aime beaucoup l'idée de ce juge prisonnier d'une certaine solitude, mais j'ai aussi la sensation qu'on se perd au-delà de ces intentions louables et que le film est quand même pas mal chaotique — à l'image de l'apparition tardive du personnage du commissaire parisien (Bernard Blier), qui insuffle une nouvelle dynamique face à Noël Roquevert à la solde des barons locaux.


Et au fond je crois que je regrette la perte d'intérêt pour le dossier noir éponyme, car au final dans le dernier tiers, c'est la confusion qui reprend autour de l'histoire de l'empoisonnement.

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le 24 juil. 2023

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Morrinson

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