Bien que "Le fils du désert" de John Ford n'appartienne pas à ses westerns les plus renommés, il a rencontré un succès notable lors de sa sortie en 1948.

Plus précisément intitulé "The three godfathers" en anglais, ce film est une allégorie inspirée de l'épisode biblique des rois mages. John Ford a dédié ce film à Harry Carey, acteur de soutien récurrent dans ses œuvres et ami du réalisateur, décédé le 21 septembre 1947.

Inspiré d’une nouvelle éponyme de Peter B. Kyne parue en 1913, le film avait déjà un précédent réalisé par Edward LeSaint en 1916 avec Harry Carey dans le rôle principal mais aussi un autre tourné par John Ford lui-même en 1919 avec encore Harry Carey au générique.

Pour cette nouvelle version en couleur, John Ford fait appel à Harry Carey Jr, le fils de l’acteur disparu.

Si l’implication personnelle de John Ford est clairement établie, on ne peut douter de son plaisir à aborder encore une fois un sujet qui lui tient à cœur en le parant d’une sublime couleur confiée à Winton C Hoch qu’il retrouvera plusieurs fois par la suite.

Dans le cadre de sa quatrième collaboration avec Ford dans un rôle principal, John Wayne opère une transition notable, incarnant avec une certaine justesse un personnage complexe. Il réussit à interpréter, avec une maladresse attachante, un homme fort confronté à une situation qui le dépasse tout en le transformant. À la tête d'un trio de bandits,

spoiler: il attaque une banque, générant une poursuite qui aboutit à ce que le petit gang se retrouve à devoir faire face à l’immensité du désert brûlant.

Le hasard place sur leur route, un chariot contenant une jeune femme (Mildred Natwick) sur le point d’accoucher qui meurt en faisant promettre aux trois hommes de veiller sur le nourrisson.

L'établissement du lien avec la légende des trois mages est désormais effectif, bien que son caractère quelque peu artificiel nécessite une certaine tolérance de la part du public, compte tenu de son aspect improvisé.

Par la suite, les trois protagonistes traversent une épreuve difficile, se révélant à la hauteur d'une mission qui les transcende et les absout de leurs actions passées.

Dans les mains d'un réalisateur autre que Ford, le film aurait pu manquer de saveur, d'autant plus que la performance de Pedro Armandariz n'est pas particulièrement remarquable.

Cependant, le réalisateur expérimenté a su ponctuer l'ensemble de scènes émouvantes ou comiques, notamment celle où Jane Darnell, avec sa stature imposante et son verve tonitruante, incarne une gardienne de réservoir d'eau qui, ne se contrôlant plus à la vue du groupe de poursuivants, exprime avec une joie revigorante la frustration sexuelle qui la consume en raison de son isolement.

Ford nous offre une œuvre d'art, démontrant toute la finesse dont il est capable.

Comme souligné, un réalisateur différent aurait pu susciter l'ennui.

Cependant, en combinant une esthétique des grands espaces, qu'il maîtrise à la perfection, notamment lors de l'unique poursuite à cheval du film, avec une sincérité constante qu'il insuffle à ses acteurs, John Ford réussit l'exploit d'immerger le spectateur dans cette épopée singulière, imparfaite certes, mais profondément émouvante.

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le 29 sept. 2025

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