Le maréchal des logis Cruchot est en poste dans un village des Alpes où il est frustré de n'avoir que quelques minables braconniers à poursuivre.Il espère un peu plus d'action lorsqu'il est muté à Saint-Tropez mais il est bien déçu de tomber sur une brigade engluée dans le farniente,entre parties de boules ou de pêche,sieste,pastis et rosé.Il va heureusement pouvoir exercer ses talents coercitifs aux dépens d'une bande de naturistes et d'un gang de voleurs de tableaux.En 64,la SNC de Gérard Beytout et René Pignères décide de capitaliser sur la popularité de Louis de Funès en portant à l'écran une idée du journaliste Richard Balducci s'inspirant de la supposée paresse décontractée des gendarmes tropéziens.C'est Jean Girault,qui avait déjà dirigé l'acteur dans "Pouic-Pouic" et "Faites sauter la banque",qui hérite de la réalisation et cosigne le scénario avec Balducci,qui deviendra réalisateur peu après,et Jacques Vilfrid,l'auteur des dialogues.Un Eastmancolor de qualité enjolive les superbes décors tropéziens,tandis que la musique tonique et joyeuse de Raymond Lefebvre participe de la gaîté générale,notamment l'incontournable "Marche des gendarmes" et le célèbre "Douliou-douliou Saint-Tropez" chanté par la vedette féminine Geneviève Grad.Les quelques scènes d'action et de cascades sont parfaitement réglées par Gil Delamare,un grand pro de la spécialité.On peut distinguer trois parties dans ce film.La mise en place d'abord,plutôt réussie,qui a l'avantage de présenter le personnage principal,Cruchot,véhicule idéal pour le registre de de Funès.Petit,nerveux,vicelard,procédurier,il n'aime rien tant qu'user de son autorité pour "emmerder les français",comme dit Macron.Colérique et agressif,il se montre aussi autoritaire avec les justiciables et ses subordonnés qu'il est mielleux et larvaire avec ses supérieurs.L'analyse des rapports hiérarchiques dans la société et des passe-droits qui y sont attachés parcourt d'ailleurs tout le film,de l'automobiliste furieux de la conduite irresponsable de Cruchot qui en rabat immédiatement en découvrant que le fautif est un gendarme au paysan à qui le même Cruchot vole son tracteur et qui passe son temps à s'incriminer pour des peccadilles alors que le militaire n'en a cure,en passant par la bande de jeunes cons qui percute volontairement une voiture dont le conducteur sera verbalisé par Merlot,la fille de son supérieur faisant partie de la fine équipe.L'humour ne vole pas haut mais ça reste efficace jusqu'à la capture des nudistes.Après ça se gâte quand l'histoire s'axe sur le personnage de Nicole,la fille de Cruchot,une sale petite pétasse manipulatrice et superficielle qui multiplie les mythos afin d'intégrer le cercle des fils à papa de St-Trop.S'ensuit une série de scènes grossièrement agencées basées sur les minauderies imbéciles de la donzelle qui ne tromperaient personne dans la vraie vie tant ça sonne faux.Mais le film redémarre en même temps que la Mustang volée par le copain de Nicole,une mécanique comique dévastatrice se mettant alors en place avec des gags et des quiproquos s'emboîtant parfaitement autour d'un Cruchot contraint de récupérer la caisse,puis de se faire passer pour un milliardaire auprès de la haute société locale tout en trimballant sans le savoir le Rembrandt dérobé que cherchent tous ses collègues.Il se livre à un jeu de cache-cache hilarant qui aboutira hélas à un final complètement raté sur le yacht avec la neutralisation débile des gangsters à la mie de pain sur fond de parodie insane de "Thierry la Fronde".Tout se terminera par un défilé sur le port en mode Kennedy à Dallas,mais sans Lee Harvey Oswald.Louis de Funès est bien sûr monstrueux,et sa performance porte le film,pas certain que ça eût fonctionné avec un autre acteur.La brigade d'origine est au grand complet avec le fantastique Michel Galabru en adjudant gueulard,l'ineffable Jean Lefebvre en fainéant plaintif,le souriant Christian Marin,le lieutenant Laverdure dans la série "Les chevaliers du ciel",et le tandem de fantaisistes formé du grand Guy Grosso et du petit Michel Modo.Geneviève Grad est une comédienne très approximative mais salement bien roulée et les seconds couteaux ont la classe avec Claude Piéplu en snobinard absolu,Maria Pacôme en veuve "inconsolable" qui chauffe grave Cruchot ou l'italien Gabriele Tinti qu'on est surpris de voir dans un minuscule rôle d'homme de main alors qu'il avait une notoriété importante.France Rumilly inaugure son personnage récurrent de bonne soeur miro qui conduit sa deux pattes comme une dingue et Fernand Sardou est irrésistible en paysan provençal cossard qui roupille au milieu de son champ sans même s'apercevoir que son tracteur passe au-dessus de lui.Jean Panisse apparait en patron de bistrot et Jean Droze en marin,ce dernier jouant aussi dans la suite,"Le gendarme à New York",mais dans un autre rôle,celui d'un gendarme italien.La jeunesse dorée est curieusement montrée comme sympathique,cette tapée de connards se baguenaudant de la terrasse de Sénéquier aux réceptions huppées de leurs parents,avec escales obligatoires en boîte de nuit.On y repère Daniel Cauchy qui ne semble pas vraiment à l'aise dans cet emploi et force son jeu,il sera plus crédible vu sa sale gueule quand il incarnera des truands.Il y a aussi un Patrice Laffont épais comme une latte en dragueur acharné,bien avant de devenir l'animateur télé que l'on sait.Yveline Céry est également de la partie,on l'avait vue deux ans auparavant dans un des principaux rôles dans "Adieu Philippine" de Jacques Rozier,mais elle disparaîtra complètement ensuite.

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le 31 juil. 2022

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