Mes petits enfants m'ont demandé comment c'était en 1966 : alors, j'ai confisqué les smartphones (..

Mes petits enfants m'ont demandé comment c'était en 1966 : alors, j'ai confisqué les smartphoneset j'ai coupé Internet !

Voilà assurément un film de vieux...
Quand on parcourt le casting, les dates de naissances de certains acteurs laissent songeurs....
Tissier : 1896, Marquet : 1895, Roquevert : 1893, Fusier-Gier : 1892 (...)
Même des gens comme Gabin (1904) ou le réalisateur Le Chanois (1909) sont tous des "vieux de la vieille" : des anciens combattants du cinéma mais aussi pour beaucoup venus du théâtre.
Pourtant, si c'est le chant du cygne et dernier film pour Le Chanois décédé en 1985, Gabin lui tournera encore 13 films quoique bénéficiant ici d'une retraite à 62 ans !...
Prémonitoire en cette veille d'élections présidentielles 2022 ?
Prémonitoire aussi : seul le couple du film semble, dans ce casting, avoir survécu à ce tournage aux studios de Saint-Maurice et Nice, et pour les extérieurs, d'Argenteuil...
J'ai nommé Pierre Vernier, 91 ans de nos jours, et Liselotte Pulver 92... Cette dernière n'a pas laissé un souvenir impérissable en France : la suissesse a surtout fait sa carrière en Allemagne et comme ici, il s'agit d'une coproduction franco-allemande, nécessité fait loi ?...
Elle en fait des tonnes de trop, trop fofolle et n'est finalement pas très crédible. Contrairement à la sobriété habituelle de jeu de Vernier.
Mais seul ces deux-là seraient en état de faire part de leurs souvenirs de tournage... Pierre, au-secours !
Ajoutons que si le communiste- cégétiste Jean-Paul Le Chanois (Dreyfus de son vrai nom) le rendait politiquement impopulaire à une certaine époque , son nom lui a disparu de bon nombre de mémoires : pourtant, l'homme a fait ce que je considère comme la plus belle des interprétations cinématographiques des "Misérables" de Victor Hugo, là encore avec son complice Gabin, pour incarner un Jean Valjean inégalé.
Le premier beau grand film de mon adolescence. A l'époque, il était sorti en deux épisodes séparés, et avait fait un tabac mémorable avec 14 millions d'entrées...
Le Chanois n'avait pas peur non plus de la difficulté ou de la censure puisqu'il avait tourné le "Cas du docteur Laurent", préconisant les "accouchements sans douleur" à une époque où selon l'éducation judéo-chrétienne, les femmes, pour se faire pardonner le péché originel, devaient enfanter dans la pénitence des souffrances ...
Côté scénario, je n'ai pas lu le bouquin éponyme de René Jouglet, mais ce qui en reste est un joyeux fourre-tout d'évènements basé sur la vie d'un retraité d'apparence paisible.
Il vit dans une vieille voiture SNCF de 3° classe en bois, réformée et posée à même le sol d'un jardin (le wagon, pas le retraité) et va prendre des vacances sur la côte d'Azur pour se reposer de la contre-façon de billets de banque.
Et va sympathiser avec un baron possédant un yacht peuplé de jeunes minettes que de nos jours, on verrait nues comme si elles venaient de naître..." Film de vieux" disais-je : féjà en 1963 dans "le Mépris", presque aucun des appâts physiques de Brigitte Bardot n'avait de secrets pour les spectateurs du film de Godard...(dont moi...)
Dans le yacht, on voit une très mauvaise scène d'un très mauvais Gainsbourg, pitoyable en acteur pseudo-caméraman de film minable.
La musique est également de lui mais ne fera pas date ...quelconque.
Aux scénario, adaptation, dialogues, un mauvais garçon repenti qui écrivait désormais pour Gabin, ce dernier s'étant fâché avec Audiard... Les textes ne seront donc pas un joyau de la littérature française mais dans le ton populaire de l'histoire.
Tout cela est pourtant et malgré son âge, très sympathique et nullement ennuyeux à suivre...
Tantôt poétique, tantôt humoristique, tantôt "Rustica", frisant même le burlesque ou le trop conventionnel... Dommage, la fin n'est pas à la hauteur du thème et elle semble expédiée.
Pas à la hauteur de l'ambiance poético-romantique environnante du retraité-jardinier-pêcheur...
Ajoutons que pour ce dernier sport, la réalisation ne s'était pas entourée des conseils d'experts en la matière : tous les véritables taquins du goujon, (les "purs et durs") savent qu'un flotteur qui dépasse de l'eau tel un phare lui vaudra des bredouilles mémorables : le vrai pêcheur lui, passera d'interminables minutes à patiemment équilibrer et tarer sa ligne, de manière à ce que le témoin plonge au fond des flots à la plus petite sollicitation de l'esche... Mais ceci est une autre histoire.
On ne verra pas du reste Gabin prendre le moindre alevin...
Pas plus que les travaux forcés à perpétuité que risquaient les fabricants de fausse-monnaie comme il était écrit sur les billets en francs de l'époque...
Les prises de vues sont superbes (sans drones) le générique original... Un régal pour moi.

France 3 le 27.03.2022-