À l’arrivée des années 70, la Hammer bat de l’aile et peine à se renouveler face à la concurrence de la Amicus. Le public est versatile et semble désormais lasser de Frankenstein et du comte Dracula, l’heure est désormais à l’horreur intimiste, celle qui s’immisce dans la réalité du quotidien et pour cause, le climat d'insécurité est palpable aux Etats-Unis marqué par les tueries de masse du Texas, ceux du Zodiaque et de la Manson Family, sans même parler de la sauvagerie des soldats américain dans le conflit vietnamien retransmis en mondovision. La période est au désenchantement et Le Métro de la Mort figure mine de rien le futur Massacre à la Tronçonneuse de Tobe Hooper de quelques années mais surtout La Coline a des yeux de Wes Craven qui partage un fait divers commun. Le film participe indirectement à cette nouvelle mouvance initié par des auteurs tel que Georges Romero avec La Nuit des Morts Vivants, desquelles suivront Délivrance, L’Exorciste ou bien La Dernière Maison sur la Gauche. Si le film de Gary Sherman n’est pas aussi connu que ces derniers, c’est parce qu’il s’inscrit dans un cadre totalement différent, celui du métro londonien. L’horreur britannique est alors engoncé dans l'épouvante gothique mais le réalisateur américain tend à le dynamiter avec une approche plus social d’où le choix de tourner dans des décors naturels notamment une station de rame désaffecté. Le coup est double puisqu’il permet de faire des économies de budget mais également de restituer l’atmosphère crade et sordide des lieux.


Alors qu’ils rentrent chez eux, deux étudiants tentent d’alerter un garde après avoir vu un homme gisant dans les escalier de la station. Ils décident de revenir sur leur pas pour lui porter assistance, mais à leur arrivée le corps s’est volatilisé. Celui qu’ils ont confondu avec un vieux poivrot était en réalité un membre éminent du gouvernement. L’inspecteur Calhoun en est alors convaincu, cette enquête est à corréler avec d’autres disparitions non résolues dans cette partie du métro. Les investigations remonteront jusqu’aux origines de sa construction. L’historique des lieux révèle une catastrophe marquante qui pourrait expliquer la longue série d’enlèvements. Suite à l’effondrement de la station avenante du British Museum en 1892 et à la faillite de la société en charge des travaux, plusieurs familles d’ouvriers furent ensevelis sous les décombres et à jamais abandonné à leur sort. Près de 100 ans après, le dernier descendant survit en kidnappant des gens avant de se repaître de leurs chair putréfié qu’il stocke dans un garde manger envahi par les rats. Ce cannibale assiste impuissant à la mort de sa femme atteinte d’une peste septicémique ce qui le contraint à s’aventurer plus loin dans les souterrains et à agresser des employés ce qui va mettre son existence au jour notamment lorsqu’il va enlever Patricia la jeune étudiante pour tenter d’avoir des rapports avec elle et perpétuer sa lignée.


Contrairement aux survivals brutaux et récit de survivants qui alimenteront les écrans tout au long de la décennie, Le Métro de la Mort adopte la forme d’une enquête policière au ton léger malgré la gravité du sujet, et aux caractéristiques so british entre la traditionnelle pause du thé, les sorties au pub et un humour très anglais, ce qui détonne assez avec le drame qui se noue en son creux. De par son passé de militant socialiste, Gary Sherman cherche insuffler à sa série B un peu de cet esprit critique et engagé, en établissant une hiérarchie pyramidale dans les rapports de ses principaux personnages qui se retrouveront à un moment donné en situation d’infériorité. Chaque strate composant la société s’emboîte comme une sorte de poupée de matriochka. De sa communauté de cannibale reclus dans les décombres d’un souterrain, aux usagers qui remonte le hub et n’affichent que du dédain pour les marginaux et sans abris qu’ils croisent en bordure de quai, jusqu’à l’inspecteur au ton gouailleur et condescendant qui aime bien rabaisser ses suspects ou ses subornés. Lui aussi sera rembarré par un agent plus huppé du MI5 qui lui interdira de marcher sur ses plats de bande. L’injustice devient donc le coeur du sujet, il est d’ailleurs affolant de constater que les autorités se décident à s’intéresser aux disparitions à compter du moment où l’affaire concerne quelqu’un d’important. En se plaçant autant en victime qu’en monstre de la société, l’ermite pathétique du film répugne autant par sa brutalité et son apparence, qu’il émeut par ses actes désespérés et tentative de sociabiliser avec une semblable en balbutiant l’expression « Mind the Door », seuls mots familiers entendu à la fermeture des portes du métro.

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le 16 oct. 2023

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