Les premières minutes de ce premier film de Mia Hansen-Løve nous plongent dans le quotidien de Grégoire Canvel, un homme pressé. Un téléphone en permanence à l'oreille, parfois deux, il court d'un rendez-vous à un autre, grimpe dans sa voiture, s'en grille une en traversant un arrondissement, fait un saut au bureau, continue une conversation, règle un problème, rassure une assistante, rappelle un auteur, s'en rallume une, prend la route, le téléphone toujours collé à l'oreille.

Voilà ce qu'est la vie de ce producteur de cinéma, qui tente de maintenir sa boîte la tête hors de l'eau. Dans un marché difficile, Moon Films fait le choix de réalisateurs originaux, pour un catalogue de films d'auteurs dont le succès commercial ne sont pas franchement au rendez-vous. Au travers Grégoire, on découvre la vie d'un homme passionné par son milieu, mais également la réalité de la production d'un film : les caprices du réalisateur, des acteurs, les retards, les factures, les banques qui rechignent à soutenir, et les dettes qui s'accumulent.

Pour autant que Canvel soit un être chaleureux et dynamique, viendra un moment ou la pression sera trop forte, et l'homme jusque là radieux, investisseur confiant, père et mari aimant, finira par plier et par disparaître, laissant derrière lui l'incompréhension, un deuil difficile et des dettes. Sa femme se battra alors pour boucler les budgets de ses derniers projets, et accorder une belle sortie à Moon Films.

Difficile d'expliquer précisément l'engouement qu'à suscité Le père de mes enfants, qui malgré un synopsis assez sombre reste un film éminemment coloré, heureux, laissant rapidement le malheur disparaître au profit de la détermination et des projets. Louis-Do de Lencquesaing porte littéralement toute la première partie du film, dans un rôle de producteur à l'allure aristo-moderne qui est délectable et mérite d'être salué, avant de laisser la place à Chiara Caselli et Alice de Lencquesaing, qui reprennent le flambeau de la seconde partie, se révélant à la fois femmes blessées et femmes fortes. Pour son deuxième long métrage, la jeune réalisatrice signe un film délicieux que je conseille sans demi-mesure.
Lubrice
9
Écrit par

Créée

le 25 sept. 2010

Critique lue 460 fois

2 j'aime

Brice B

Écrit par

Critique lue 460 fois

2

D'autres avis sur Le Père de mes enfants

Le Père de mes enfants
Sergent_Pepper
7

Ceux qui restent

La réussite du film tient dans sa première partie. Incroyable de spontanéité et de fraicheur, elle nous plonge dans le quotidien familial. La relation entre le père et ses trois filles est...

le 3 déc. 2013

13 j'aime

3

Le Père de mes enfants
PatrickBraganti
4

Critique de Le Père de mes enfants par Patrick Braganti

C'’est peut-être parce que Humbert Balsan avait décidé de produire Tout est pardonné que la réalisatrice Mia Hansen-Lǿve s'’inspire pour Le Père de mes enfants du destin brisé d'’un homme (qu’'elle...

le 16 nov. 2012

8 j'aime

5

Le Père de mes enfants
eloch
8

De la chute d'un héros.

" Le père de mes enfants", c'est d'abord l'histoire d'un homme à fond dans la vie, que toute la première partie du film montre détaché, à l'aise, grandiose, passionné, amoureux. Il est aimé partout,...

le 9 mai 2013

8 j'aime

Du même critique

Le Secret de Brokeback Mountain
Lubrice
9

Critique de Le Secret de Brokeback Mountain par Brice B

Ah, qu'il m'en aura fait verser des larmes, ce film. Il en a fait également couler, de l'encre, lors de sa sortie. Film gay ? Pas vraiment. Le secret de Brokeback Mountain fait parti de ces films qui...

le 7 janv. 2011

47 j'aime

2

Le Livre des Baltimore
Lubrice
10

Critique de Le Livre des Baltimore par Brice B

Publié sur L'homme qui lit : L’ébulition de la rentrée littéraire retombe à peine sur les très ennuyeux prix littéraires, que la sphère culturelle s’agite de nouveau, et qu’un seul nom revient sur...

le 3 oct. 2015

30 j'aime

1

Le vent se lève
Lubrice
8

Critique de Le vent se lève par Brice B

Le film commence par une séquence forte. On assiste, impassibles, à la mort d'un jeune homme de 17 ans, mort sous coups des soldats de la couronne pour avoir refusé de décliner son identité en...

le 7 janv. 2011

25 j'aime