Réalisateur de controverse, j’éprouve un vif intérêt pour le travail de Zack Snyder au point de ne pas le réduire à un plaisir coupable coutumier : car, exception faite d’un 300 l’étant définitivement, sa patte outrancièrement épique et sa générosité chronique composent une filmographie méritant davantage d’éloges. De fait, si Watchmen semble perçu à sa juste valeur, difficile d’en dire de même pour des Sucker Punch, Man of Steel ou encore Dawn of Justice… mais avant qu’il n’investisse pour de bon le DC Universe, un certain Le Royaume de Ga’Hoole passait par là.
Étape certainement la moins renommée de sa carrière, cette adaptation d’une série de romans de l’auteure Kathryn Lasky vaut bien sa mention : nonobstant sa patente étiquette de récit pour enfants et sa qualité de film d’animation, celle-ci transpire sous toutes ses plumes la signature du susnommé, tout en proposant une relecture attendue mais divertissante du parcours initiatique d’un jeune Héros en devenir. Avec pas moins de quinze tomes, nul doute que le scénario d’Emil Stern et John Orloff offre une version tronquée comme ajustée de l’univers original, mais gageons (faute d’en avoir ouvert un) que le contrat est malgré tout rempli.
Certes, Ga’Hoole satisfait tous les prérequis du concept de Joseph Campbell, mais son jusqu’au-boutisme et son rapport au concept de légende forcent l’attention : nous songeons naturellement à la matérialisation sciemment réaliste de ses Strigidaes, contrepoids et complément d’une teneur fantaisiste prépondérante, elle qui leur confère don de parole, de morale ou encore d’artisanat. Puis vient son rapport résolument premier degré au mythe, quitte à malmener de bout en bout la portée de ses symboles ou encore sa cohérence toute relative : pourtant, force est de constater que l’ensemble se tient au point de captiver, un émerveillement sporadique émergeant même ci et là au gré du style poseur de son metteur en scène.
Si nous pourrions lui reprocher sa grandiloquence commode, autant en souligner la verve majestueuse : Ga’Hoole est dès lors un pur produit à la Snyder, sa propension sans garde-fou à esthétiser et iconiser ses personnages offrant de quelques chouettes séquences… certes, l’usage presque abusif du slow motion risque d’en rebuter plus d’un, mais que voulez-vous ? Si nous pouvons débattre de la beauté du long-métrage, impossible de nier ses francs partis pris, parfaits supports d’une incursion au sein d’un royaume dépaysant à défaut de subjuguer. À ce titre, il est indéniable que l’intrigue souffre de son profond conventionnalisme, celle-ci paraissant régurgiter toute une pléiade d’inspirations en une pelote attendue.
Le fond fait donc quelque peu défaut à son bel écrin, sa prévisibilité chronique gâtant variablement l’immersion : l’effet s’incarne notamment dans le schéma balisé suivi par la narration, mais aussi dans l’usage de figures tierces dont la duplicité future ne fait d’ores et déjà aucun doute. Par ailleurs, Ga’Hoole pâtit vraisemblablement de sa faible durée tant il précipite les événements, scènes et autres points pivots perdant par voie de fait en crédibilité et impact… l’empreinte handicapante de pareils écueils n’est toutefois pas rédhibitoire au point d’invalider tout le reste, pour peu que comme moi vous soyez sensible à son atmosphère homérique.
Petite curiosité imparfaite mais divertissante que ce Snyder mineur en somme, une proposition de vol atypique comme téléphonée portée par son casting vocal aux petits oignons.