Sami est interprète syrien. Lors des Jeux olympiques de Sydney en 2000, il laisse échapper une parole contre le régime qui le contraint à demander l’asile à l’Australie. Lorsque la révolution éclate onze ans plus tard dans son pays d’origine, l’homme prend le risque d’y retourner afin d’aider son frère fait prisonnier.
Lorsqu’à la frontière, le douanier demande au chauffeur du camion dans lequel se cache Sami où il emmène ses moutons, cinglante est la réponse obtenue : « A l’abattoir ». Dans cet état en guerre, où le printemps n’a plus jamais laissé place à l’été, le traducteur est une cible mouvante. Il lui faut échapper aux snipers, retrouver sa famille, gérer les coupures d’eau et d’électricité, se méfier enfin de tous, amis ou ennemis d’hier et d’aujourd’hui. Militant de père en fils, il lui est reproché d’avoir fui le pays ou de n’être pas revenu plus tôt. Une culpabilité ressentie pour celui qui, par son métier, se cache derrière les mots des autres plutôt que d’assumer les siens. Sa belle-sœur opticienne se charge de lui fournir de nouvelles lunettes, afin d’y voir plus clair.
Il y a peu, Aïda donnait de la voix pour exprimer l’indicible à Srebrenica. Son cri retentissant suscitait l’effroi. Par contraste, celui-ci s’avère moins puissant malgré un sujet tout aussi tragique. Mélange de drame et de thriller, le film peine à trouver son équilibre. La première scène, sise dans l’enfance des principaux protagonistes, suscite la confusion. Les ellipses temporelles et le rythme soutenu peinent à installer les personnages. Le récit programmatique se décline de manière assez mécanique, réfrénant l’émotion. Il n’empêche que ce premier long-métrage de deux cinéastes syriens en exil, questionnant l’engagement sur place ou à distance, a le mérite d’exister.
(6/10)
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