Le désert : comment imaginer un meilleur lieu pour étudier le fond des relations humaines ? Limitez l'eau, réduisez l'espoir de tout passage humain à 0,1%, et détruisez les moyens de locomotion. Observez. Il y a ceux qui perdent leur sang-froid, ceux qui suivent, désespérés, ceux qui essaient d'agir, mais mal, et il en a toujours quelques uns, heureusement pour le cinéma, qui ont vraiment envie de vivre, et qui se montrent créatifs.

Le spectateur embarque à bord d'un avion conduit par Frank Towns, un personnage interprété par James Stewart, qui pour une fois ne joue pas les gentils. Le Capitaine Towns, en effet, est un vieux grincheux à l'orgueil mal placé, si mal placé qu'il se comporte de façon exaspérante pendant une bonne partie du film. Car non seulement, c'est ce croulant sénile qui nous crashe au milieu du désert, mais en plus il se montre incapable de prendre la moindre bonne décision ("Attendons gentiment, quelqu'un va bien finir par nous trouver !" -> Bon dieu, capitaine, c'est un film, pas une promenade de santé !). De là naît une relation conflictuelle avec Heinrich Dormann (joué par l'allemand en herbe du cinéma d'après-guerre, Beau Gosse Hardy Krüger), qui lui se met à faire des plans ambitieux pour nous sortir de là. Puisque la réalité ne se montre pas à la hauteur, il ne reste plus que ça : rêver. Et Heinrich est le rêveur salvateur du film, non sans ressemblance avec Fitzcarraldo (dans le film éponyme), qui est convaincu qu'il pourra faire passer un gigantesque bateau par-dessus une montagne.

Mais je ne vais pas vous révéler le rêve d'Heinrich, et plutôt me contenter de reprendre les mots de Torpenn quand il m'a conseillé le film (merci) pour vous le résumer : « En gros, ce sont des mecs au milieu du désert, qui n'ont rien d'autre pour survivre que les restes de l'avion avec lequel ils se sont échoués. »

Entre une histoire de survie et une histoire de projet fou, le film ne peut que se révéler passionnant, n'est-ce pas ? Et en effet, il l'est. La réalisation brillante d'Aldrich fait que l'on colle toujours au plus près de l'histoire, se laissant soi-même emporter par la nécessité de survivre, au milieu de tous ces personnages un peu stupides, rendus de plus indisciplinés dans leur panique. Là où, habituellement, dans les films de survie, on se trouve de l'empathie pour chacun des personnages, on ressent pour une fois la présence pesante de l'altérité. C'est vraiment comme si on se retrouvait bloqués avec nos péquenots de voisins de vol et qu'il fallait faire avec.

Et comme on accroche si bien au film, on ne se rend compte de ses défauts qu'après l'avoir fini. Donc on reparlera de ça quand vous l'aurez vu !
Philistine
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le 10 sept. 2011

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