Ce film de Bernard Giraudeau sorti en 1996 gagne à être vu plusieurs fois. Ce n'est pas que l'histoire soit compliquée. C'est plutôt qu'il y a beaucoup de non-dits, que bien des personnages ou des actions restent imprécis alors que le film est d'une richesse et d'une profondeur certaines.
L'histoire raconte l'exil, en 1786, comme gouverneur d'un comptoir français de la côte sénégalaise, d'un noble français, Jean-François de la Plaine, après avoir tué un ami du roi lors d'un duel. Il y découvre l'Afrique, la chaleur, le négoce des esclaves noirs pour alimenter les "marchés" américains ou arabes. Libre-penseur, ouvert aux nouvelles idées des philosophes du XVIII°, le gouverneur reste réservé sur les trafics d'esclaves noirs, hautement encouragés par le pouvoir royal, auxquels il se garde de tremper. Ainsi, le personnage va évoluer tout au long du film à travers l'amour d'une jeune esclave noire qui lui a été offerte par un prince berbère du désert et qu'il va éduquer lui-même après lui avoir donné un nom, Amélie.
Le rythme du film est lent, à l'image d'un pays écrasé par la chaleur où le temps s'écoule lentement. La photographie des paysages sénégalais, du fleuve et du désert, de Jean-Marie Dreujou est magnifique et rend bien compte de cette impression d'immobilité alors que les rares nouvelles de France sont étonnantes avec le déclenchement de la Révolution.
Globalement, ces éléments de mise en scène, les costumes et les perruques restituent une ambiance réaliste et convaincante de cette époque, de cette nonchalance africaine où rien n'a vraiment d'importance sinon l'amour.
Côté distribution, les personnages joués par Giraudeau, Richard Bohringer et Thierry Fremont sont d'autant mieux soignés qu'ils deviennent des amis qui se refusent à se compromettre avec les trafiquants dont un des représentants est interprété par un cynique Roland Blanche.
Et pour le fun, citons Aissatou Sow dans le rôle très attachant d'Amélie …
Ah oui, signalons la présence (sympathique) dans un tout petit rôle de vieille duchesse (presqu'un caméo) de cette grande actrice qu'est Marie Dubois …
Pour finir, c'est un film que je n'ai pas trouvé facile d'accès. Mais, une fois entré, on est vite subjugué par l'itinéraire cet homme exilé en Afrique, qui apprend la tolérance et l'intérêt qu'on peut trouver dans la différence.