Sur le métier je remets mon ouvrage et fais peau neuve de tout jugement critique au regard des Contes de la Lune Vague après la Pluie de Kenji Mizoguchi, une Oeuvre de pur Cinéma qui m'avait pratiquement laissé de marbre lors de sa découverte il y a désormais une dizaine d'années...
Immersion d'une éminente modernité dans le Japon médiéval de la fin du XVIème Siècle ce jalon du kaidan-eiga de l'âge d'Or mizoguchien sidère par sa sophistication visuelle et sonore, sa précision et sa concision mêlées d'impressions rémanentes pour le moins troublantes voire étonnantes. Et pour cause : Les Contes de la Lune Vague après la Pluie est une Oeuvre de Septième Art formellement irréprochable, donnant littéralement "à voir" ce qui n'est pas obvieusement mon(s)tré par le réalisateur nippon. Cet Art de la synthèse accouplé à une méticulosité à toute épreuve est d'autant plus impressionnante lorsque l'on considère la créativité extrêmement prolifique de Kenji Mizoguchi ( près d'une centaine de films réalisés en quarante années à peine, dont plus de la moitié semble s'être perdue dans les limbes d'un imaginaire que l'on se plairait à rêver, fantasmer, mais hélas...).
Certes le film n'est pas chiche en termes de classicisme, de personnages archétypaux et de codifications systémiques ( figures de la femme pervertie et tentatrice évoquant la vamp de L'Aurore de Murnau et du samouraï comiquement téméraire d'une part, mythe de Eros et Thanatos et apanage féodal pragmatiquement développés d'autre part, mais encore...) mais son agencement est d'une telle maîtrise qu'il permet de dépasser le simple cadre du film de genre historique, s'annonçant avec élégance comme une fable d'amour terrible voire émouvante, dont l'avant-dernière séquence saisit par sa dimension tour à tour mélancolique, illusoire et définitivement profonde...
L'un des plus beaux films parmi ceux que j'ai eu l'occasion et la chance de découvrir de celui que d'aucuns considèrent comme l'un des plus grands cinéastes de l'Histoire du Cinéma... à juste titre, assurément.