Biopic orange, complètement Stone
The Doors par Oliver Stone, le bien nommé. Val Kilmer en Jim Morrison, complètement stone lui aussi. J’ai tellement l’habitude de le voir dans des seconds rôles, que ça m’a fait tout drôle de le voir en leader du show. Et je pensais même que le film était raté à cause de ça, car ce film a je ne sais pourquoi, une mauvaise réputation. J’ai toujours entendu dire que Stone avait raté son biopic, comme si il n’y avait qu’une façon de faire un biopic. Le principal reproche, avoir transformé l’histoire des Doors en trip hallucinogène orange. Bof ! Pour une fois qu’un américain prend des risques en faisant une bio…Je trouve que Val Kilmer ne ressemble pas à Jim, mais le film avance avec une telle force, comme un rouleau compresseur, qu’il finit par tout emporter sur son passage. Comment faire un film sur les Doors, et ne pas faire un film sur Morisson ? Stone répond à sa façon, en faisant un film d’auteur plus qu’un biopic. Kilmer on ne comprend presque jamais ce qu’il dit, vu qu’il est stone les deux tiers du film, et le montage porte la marque de l’auteur, très pop, coloré, baroque, très Stone. Une sorte de réalisme fantastique, avec force anecdotes salées, racoleuses, et ici s’ajoute une leçon de shamanisme. C’est ce style épileptique, qui aboutira au fameux, Tueurs nés. C’est un vrai parcours initiatique, auquel nous invite Stone. On oublie vite les Doors, on suit Morisson. Road trip orange. Une plongée dans une époque révolue, durant laquelle on couchait à droite et à gauche, où on se droguait avec n’importe qui, on montait sur scène défoncé, sous l’œil vigilant de la police, on choquait les bonnes mœurs, et les bourgeois. Finalement, Kilmer devient Morisson. Plus le film avance, plus il grandit, pour une composition ébouriffante, sûrement son meilleur rôle. Les fans acharnés vont reprocher à Stone, sa complaisance plus qu’assumé sur les frasques de la rock star, un portrait pas si flatteur que ça. Mais on le savait dès le départ qu’il était excessif Oliver, on le sait. C’est une de ses qualités, ou un de ses défauts, c’est comme vous voulez. Par moments c’est clairement le journal Closer, version années 60. Jim était loin d’être parfait, on s’en doutait, mais pas à ce point là ! Les anecdotes sont si précises, si claires, sans aucune ambigüité, qu’elles doivent sûrement être vraies. Et Manzareck a, semble-t’il aidé Stone, donc il cautionne implicitement cette version des faits. C’est peut-être pour ça que ça ne sonne pas faux ou artificiel. C’est une expérience artistique pure jus, trop subjectif et trop maitrisé pour être de l’artifice. C’est de l’expressionnisme pop, à la lumière du flower power moribond. C’est très beau, surtout les moments de trip justement. On a l’impression d’avoir pris un truc et on plane aussi, dans un brouillard orange... Les concerts qui se terminent en fête dionysiaques, et le roi lézard, à moitié indien Navajo, à moitié poète Rimbaldien, part à la conquête de l’Amérique puritaine, pour le destin que l’on sait. Ça vaut franchement le coup d’œil.