Le goût du sang
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Bonjour.
Dans la sphère médiatique où chacun peut parler à qui veut bien l'entendre, on assiste trop souvent à un déferlement d'insultes et de haines faciles. C'est déplorable et sans intérêt.
Dans certains sites, de prime abord plus tranquilles, on peut être étonné de cette quiétude qui émane d'une atmosphère consensuelle : on est pratiquement toujours assez d'accord et on s'en congratule avec force vocables de franche camaraderie. Lol !
Il s'avère à l'usage que cette croûte dorée cache la réalité où la recherche de débat et de partage véritable s'englue dans tantôt le ghosting et tantôt dans le verrouillage de certains avis envers ceux qui pourraient gêner l'expression monolithique de certains qui croient savoir ce qui est ou n'est pas exprimable : tout sauf un avis qui puisse leur être contradictoire et pourrait dévoyer leur fan-club.
La lecture des commentaires des avis est très claire de ce point de vue : on est consensuel et dans le compliment ... sinon gare au ghosting organisé.
L'enrichissement de chacun dans le partage des avis serait pourtant de pouvoir s'affronter dans les différences de points de vue, dans le respect des formes et du fond, sans pour autant verser dans un bene-oui-oui béatement assujetti à la paix à tout prix.
D'un autre côté, cette paix des plumes et le plaisir qu'on peut y trouver peuvent se concevoir. On peut ne pas aimer se faire voler dans les plumes. Tout écrivaillon en sera d'accord. C'est confortablement idyllique. Et trompeur d'autant.
C'est une façon d'éviter une situation telle qu'exposée par Ridley Scott concernant l'idée qu'on s'est faite un jour de l'honneur (pardon pour le gros mot) dans un régime politique d'hier, et demain caduque dans le régime suivant. Je veux parler de "Duellistes". On y voit deux sens de l'honneur s'affronter à mort. Dans un respect pourtant réciproque l'un pour l'autre, deux hommes de chair et de sang, et pas seulement des idées, s'y affrontent à mort, mais bien vivants, eux.
Et l'issue de l'histoire qui met sur la touche l'un des duellistes, aux idées trop anciennes, est-elle honnêtement satisfaisante pour nous autres, spectateurs d'un siècle de paix ?
Mais de quelle honnêteté peut-on se réclamer quand on s'arrange pour parader sans avoir à croiser le fer avec le fantôme de sa propre probité ?
C'est pourquoi "Duellistes" est un grand film jusque par-delà sa spectaculaire mise en scène de cette idée que, fût-ce par les armes, il est sain et nécessaire de s'affronter pour être humain et fier de l'être.
À une époque où, sur 70 millions d'habitants de notre pays, à peine 100 000 hommes ont répondu à l'appel de l'autorité nationale de se présenter volontaire pour défendre ce même pays en cas de nécessité, une petite piqûre de rappel du sens de l'honneur paraît ne pas être inutile.
Peut-on et doit-on systématiquement fuir l'idée même d'affrontement, au risque de se retrouver acculé à des situations déshonorantes ? Ce ne devrait être satisfaisant pour personne en possession de cette qualité émanant d'une honnêteté intellectuelle et affective qu'on appelle sens de l'honneur.
Oui, vraiment, jusque dans la relégation des braves, le sens de l'honneur, quel qu'il puisse être pour chacun, est une pièce de la colonne vertébrale dont on devrait considérer l'importance.
C'est la morale (pour autant qu'il soit permis que cela existe) qui peut ressortir de cet excellent film de Ridley Scott, "Duellistes", où l'on voit une conception de l'honneur se faire enterrer par une autre, et par ses propres armes. Face à face. À la loyale. (Pour ce dernier terme peut-être obscure, il est vivement conseillé de consulter un bon dictionnaire de français : "qui obéit aux lois de l'honneur et de la probité" nous dit l'ami Robert. On n'a pas fini de creuser à partir de ces deux termes trop oubliés. Encore faut-il le vouloir.)
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il y a 5 jours
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