Dans cette France de fin du monde et de début de siècle, deux visions différentes d'un même paradigme s'affrontent, deux fines moustaches, deux élégants d'allure romanesque, respectant le vieux code d'honneur viril et sanglant, reliquat de la chevalerie. Mais l'un provoque sans cesse, il y' à un agresseur identifié. C'est un film sur une traque, sur l'obstination et l'amour déraisonné.


La réalisation est centrée, cintrée même, comme les tuniques des hussards. Les décors sont beaux, les scènes sont belles, les tableaux sont peu nombreux mais mieux vaut qualité que quantité. Les costumes, l'ambiance bivouac, les cartoufles qui cuisent et les pipes qui se bourrent, la belle campagne, tout est là. Avec les petits moyens, cela donne un coté réaliste et surtout très intimiste.


Le personnage de Keitel, le borné furieux et idéaliste bas du front mais tellement efficace, est très original et aurait mérité d'être plus travaillé. On lui prête volontiers des fulgurances.


On en vient à s'identifier très vite au personnage joué par carradine, mais plus le film passe et plus j'ai compris l'idée derrière la façade de son ennemi. La scène finale, après analyse, apporte le score du match : nul .Puisqu'en résumé l'agressé est devenu un bourgeois royaliste et quasiment autant jusqu'au-boutiste que le zélé agresseur, qui lui, n'a jamais transgressé le code d'honneur ni même son serment envers l'empereur. La scène finale, le montre en Napoléon assumé, contemplant le lit d'un cours d'eau qui zèbre la campagne verdoyante d'une France qui respire et qui respirera encore un bout de temps, et cela grâce à ces deux caractères. La tempérance et le zèle, Yin et Yang indispensables l'un à l'autre.


On se découvre donc soi-même des zones d'ombres tout au long de ce film, on le mêle quelque peu avec notre sang. Nous maudissons le chasseur, le fou belliqueux, par devant, mais par derrière, misons quelques Napoléons d'ors sur lui.


Le rôle de la "fille à soldat" est vraiment intéressant aussi. On devine son cheminement intérieur chaotique et son aventure du même acabit. Elle vivote au gré des officiers qui vivent puis meurent. Elle convole vers ses amants comme une girouette pointerait la mort prochaine. Si vous êtes dans son lit, c'est que celui qui y était hier au soir est désormais endormi pour toujours, la mâchoire arrachée par un ange ou sous une toile tachée.


En fait, on ne dirait pas du Scott. C'est bluffant.

johnfantebis
8
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le 8 déc. 2015

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johnfantebis

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