Adapté de la pièce de théâtre du même nom, Les Enfants du Silence sort fin 1986 aux États-Unis et début 1987 en France.
L'intrigue prend place en Nouvelle-Angleterre (région du Nord-est des États-Unis regroupant les États du Maine, Massachusetts, Vermont, New Hampshire, Connecticut et Rhode Island) dans une zone insulaire plutôt isolée.
On y suit James Leed, professeur pour sourds et malentendants chevronné, fraîchement arrivé à l'école spécialisée Governor Kittridge. Il y rencontrera Sarah Norman, ancienne élève sourde de naissance dotée d'un tempérament volcanique, aujourd'hui employée par l'école en tant que femme de ménage. Leur histoire sera le cœur du film, celle pour laquelle on va vibrer, rire, s'émouvoir et se questionner.
Bien construit et structuré, le long-métrage prend le temps de planter son décor et de présenter ses personnages.
Atypique par son tempérament et sa pédagogie, James Leed capte vite notre intérêt et notre sympathie par son approche non-conventionnelle auprès de ses élèves. Pas de chemin balisé, pas de tabou, juste proximité, individualisation, valorisation... En résumé, une pédagogie riche et instructive, qui fait ses preuves... On ne peut s'empêcher d'y déceler quelques points communs avec celle d'un certain Mr Keating, que l'on découvrira 3 ans plus tard dans Le Cercle des Poètes Disparus. L'atmosphère de l'école, son cadre intimiste et les liens de Leed avec sa hiérarchie y sont toutefois beaucoup plus doux. Bien qu'on puisse redouter au prime abord un Directeur qui va lui mettre des bâtons dans les roues, celui-ci se révèle au final plutôt sympathique et protecteur.
Le film s'engage peu à peu dans une LOVE STORY authentique, à travers une rencontre entre 2 mondes : le BRUIT et le SILENCE. Ce dernier y est d'ailleurs superbement illustré lors des scènes aquatiques, en se concentrant sur le VISUEL et nous immergeant dans la reconnexion à soi, ou la connexion à l'autre.
L'histoire d'amour entre les 2 personnages trouvera sa complexité dans l'obsession de James à faire parler Sarah, malgré le refus catégorique de cette dernière, dû à un passé traumatique. Ce difficile apprivoisement entre les 2 univers propres aux 2 personnages se matérialise dans des scènes de tension régulière entre James et Sarah. Il trouvera sa résonance dans l'interrogation finale de James : " Penses-tu qu'un jour, nous pourrons trouver un endroit où nous retrouver, ni dans le silence ni dans le bruit ? "
Cette interrogation peut également se traiter au sens large. Face au handicap de la surdité et de la malentendance, l'apprentissage de l'élocution est-elle vitale ? Ou la société doit-elle au contraire s'adapter, lorsque cet apprentissage se révèle impossible ou non souhaité ? Intégration ou inclusion, le film apporte une réponse pour le moins pertinente...
Particulièrement bien interprété, le long-métrage met en lumière l'alchimie parfaite entre William Hurt et Marlee Matlin, actrice réellement sourde, qui réussit la prouesse de nous envoûter par sa gestuelle, ses regards et ses expressions faciales.
Rare film traitant la thématique de la surdité et de sa place dans la société, Les Enfants du Silence nous pousse à la réflexion et nous interroge sur les réponses apportées par notre société. Le cadre géographique isolé dans lequel prend place l'intrigue illustre ce questionnement. Éloigner l'accompagnement des personnes sourdes et malentendantes vise-t-il à les protéger, ou est-ce au contraire un aveu d'impuissance face à la trop faible réponse offerte ?