La réunion

On touche ici à un registre qui ne me touche que très rarement, le film de copains qui se retrouvent sur le tard et qui se remémorent un passé commun et distant sur fond de mélancolie. Je garde en tête le film de Ettore Scola "Nous nous sommes tant aimés !" (1974) et celui de Mario Monicelli "Mes chers amis" (1975), tous deux grandement postérieurs au film de Damiano Damiani qui évolue ici, au début de sa carrière, dans un registre sentimental assez éloigné de ce qui fera sa marque de fabrique plus tard.

Ce qui me dérange le plus souvent, quand il n'y a pas de soucis de doublage propre au cinéma italien des années 60-70, c'est la prévisibilité de l'entreprise : on voit bien que cette réunion un brin forcé d'un groupe d'amis est là uniquement pour faire remonter à la surface des souvenirs quasiment enterrés, dans un flot de mélancolie qui accompagne ces retrouvailles de nombreuses années après leur séparation. Ils ne sont ni jeunes ni vieux et souhaitent renouer avec une forme d'insouciance de jeunesse, et au fil de leurs élucubrations plus ou moins louables, les pensées plus ou moins heureuses resurgissent. La bonne humeur initiale laissera place à une certaine amertume, à mesure que les différences existentielles se seront explicitées.

Ils ont beaucoup changé depuis leur jeunesse, mais finalement pas tant que ça, semble nous dire Damiani. Il y a la réussite économique pour les uns et la réussite morale pour les autres (Cesarino, en réalité), et le sentiment de jalousie sera partagé par bon nombre d'entre eux. Les motifs d'une ancienne rupture se révèlent alors peu à peu, comme une esquisse incomplète, et cette disposition-là est très réussie dans le film. J'ai en revanche moins accroché au cynisme affiché par les anciens amis qui forme un mur sur lequel viendra inéluctablement s'écraser la sensibilité de Cesarino.