« La mode, dans toute sa tyrannie, a fait son apparition. » Décidément, Proust a toujours le mot juste. Béla Tarr n’est habituellement pas de ces puériles lyriques. Mais il faut bien croire que l’usure et la bêtise rattrapent autant Lamartine que les plus grands cinéastes. Mais avant de voir le déclin du réalisateur tendu vers l’homme, revenons sur Béla Tarr.
Homme de caméra hongrois, il s’exerce à la représentation réaliste de son pays. Vivant des temps difficiles après la chute du communisme, il substitue le cinéma à la thérapie de choc. Ses films sont lents, parfois longs sept heures trente pour Sátántangó mais toujours finement jugés. Finement exécutée, une qualité indéniable dans la grammaire stylistique tarrienne : sa mise en scène. Obsédé par celle-ci, la scénographie est son manifeste. Ce scénophile.
Bien. Le triptyque du chœur social est clivant. Essor, apogée, et déclin. Ce dernier principe, douloureux, s’investit chez Tarr dans ce film, Les Harmonies de Werckmeister. Ce film parle de l’arrivée d’un triste cirque qui traîne une baleine dans une remorque. Un jeune homme, János, tente de préserver l’ordre dans une ville de plus en plus perturbée par les événements. L’histoire, à la manière d’Angelopoulos, ne m’a pas particulièrement déplu. C’est dans l’esthétique du film que se trouvent mes raisons de mépris.
Déjà, sa mise en tension est maladroite. Tarr récite son chapelet : le noir et blanc. Il noir-et-blanctise l’image pour faire sombre et tragique. Quand il ne se dessert pas du fait de l’incolore, il rate ses effets de lumière. Sans arrogance, j’ai trouvé la mise en tension assez triviale. Simple comme le bleu mélancolique ou le rouge passionné. C’est du cinéma désorganique. C’est comme un contrepied aux orgasmes esthétiques révolus de Sátántangó. De surcroît, ces musiques artificielles guident les passions en les prenant par la main. Quelle bêtise. C’est en cela qu’il tombe dans les effets de mode. Suivant la tradition d’Angelopoulos, il use de la musique comme d’un cadre solitaire.
Aujourd’hui, pas de très longue critique, donc je vais faire une conclusion simple : on est soit homme, soit réalisateur. Tarr est décevant. Je n'accroche pas à l'esthetique «malade». Ces idées ont tourné dans trop d'esprit. Le bordel esthétique, la musique dans les films ? la prostit de l'art.