Avec Sergio Leone, Don Siegel fut l'autre mentor de Clint Eastwood qui dédia son chef d'oeuvre Impitoyable à ses deux mentors. Mais être mentor de Clint Eastwood ne sont pas les seules similitudes entre les deux réalisateurs d'abord qu'ils ont réalisés des westerns (pour Siegel Sierra Torride et Les Proies et les westerns urbains avec Un shérif à New York et Dirty Harry) mais surtout que ce sont des très bons réalisateurs. Clint Eastwood eut la chance de commencer avec des réalisateurs de talent (probablement pour ça qu'il est devenu bon réalisateur). Et ses collaborations avec Siegel furent de qualité sauf Un shérif à New York que j'aime un peu mais dont on ne va pas se mentir n'est pas terrible, les meilleurs étant Les Proies, Dirty Harry et L'évadé d'Alcatraz. Pour revenir au film ceci est la troisième collaboration entre Don Siegel et Clint Eastwood, Les Proies est un film pervers et sans concession qui montre les conséquences de la jalousie et de la manipulation.

On commence à poser le contexte avec la Guerre de Sécession qui ajoute un cadre envoûtant et presque intemporel au film mais aussi un huis clos où la grande majorité du métrage se trouve dans le domaine presque éloigné du monde. On montre aussi à l'intermédiaire de la mise-en-scène que John McB joué par Clint Eastwood est prisonnier de cet endroit, d'abord par sa jambe cassé puis par l'image comme la scène où une des filles du pensionnat le voit embrassé une autre, en plus d'être un plan voyeuriste on a le motif des barreaux puis également le grillage pour entrer dans l'école ressemble fortement à des barreaux de prison cela représente que le personnage est prisonnier de cet endroit et qu'il ne peut pas en sortir.

Ce qui est bien aussi c'est qu'avec ce duel de manipulations et de coups dans le dos, le réalisateur ne prend pas parti, il montre les choses tels qu'elles sont sans jamais trop en montrer. D'abord on est plus du côté des femmes car John McB manipulé de la naïveté des femmes et avoir des relations avec des mineurs, puis on est un peu plus de son côté quand il tombe dans l'escalier et ensuite on est plus d'aucun parti. Il joue sur l'ambiguïté même dans le titre original "The Beguiled" qui veut dire "Le séduit" ou "Les séduites". Qu'est ce qui est séduit et manipulé entre le soldat du nord qui subit les crises de jalousie et de manipulation des femmes du sud dans l'internat ou ces femmes qui sont toutes manipulés afin d'avoir de la chair et aussi sortir de cet endroit ? Tout le monde à quelque chose à se reprocher et bien sûr c'est le yankee qui en plus le plus pour son grain car c'est lui l'ennemi il est soldat nordiste et c'est lui le seul homme parmi ces femmes. Ils sont tous esclaves de leur pulsion et de leur jalousie surtout les femmes qui ne voit pas beaucoup d'hommes et qui voient arriver un homme beau qui leur fait fantasmer.

Une des plus grandes qualités du film est celui de la mise en scène et du jeu des acteurs. Don Siegel prouve une fois de plus que c'est un très bon cinéaste, en sachant bien mettre en scène les scènes oniriques qui montrent les pulsions et fantasmes ainsi que leurs souvenirs traumatiques, mais également les scènes les plus marquantes. Je pense notamment à la scène où John McB se réveille et découvre qu'il n'a plus sa jambe où on on a des plans en vue subjectifs du personnage de John McB découvre qu'il n'a plus de jambe. Ce qui est incroyable c'est donc à quel point la mise en scène de Siegel rend cette scène intense avec la succession des points de vue, mais aussi on ressent beaucoup de pitié et d'empathie pour le personnage de McB car on sait on l'a vu dans la scène d'avant qu'on lui a coupé sa jambe mais on découvre sa jambe qui manque en même temps que lui par son point de vue. On ne peut que comprendre par la suite la rancune qu'éprouve le personnage. Surtout qu'on joue sur l'ambiguïté que la directrice a coupé sa jambe pour le sauver ou pour le punir d'avoir couché avec une autre femme. Même si moi je pense que c'est parce qu'il a couché avec une autre femme, c'est suggéré par le fait qu'on meurt dans peu de cas d'une jambe cassée, ce qui est dit par le personnage de la servante. A part donc la mise en scène, les personnages en plus d'être bien écrits et crédibles, ils sont bien interprétés par les acteurs. Même Clint Eastwood qui en plus de bien collé au rôle joue vraiment bien son personnage, quand il s'énerve après avoir perdu sa jambe on y croit.

En plus de cela, on a un rôle complètement à contre-emploi dans la carrière de Clint Eastwood à cette époque. Il était connu pour ses rôles virils, puissants, quasi-intouchables et aussi pour ne jamais mourir dans un film. Il était un peu le symbole de la virilité et de la masculinité puissante. Ici, son personnage qui est viril subi une castration métaphorique quand on lui coupe sa jambe perd sa puissance masculine face aux femmes, en plus de mourir à la fin du film. On joue avec le spectateur de l'époque, qui s'attendait à voir Clint Eastwood en héros intouchable et fort qui triomphe à la fin.

En conclusion Les Proies est un drame psychologique et érotique envoûtant et sans concession qui prend le spectateur de l'époque à contre-pied, bien réalisé par le très bon réalisateur Don Siegel, et une très bonne interprétation de la part des acteurs. Les Proies est un film qui ne laissera personne de marbre tant le film est complexe, riche, dure et marque par l'intensité des scènes et de ses thématiques.

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le 11 août 2023

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Lyam_80

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