Au delà de tout propos, Les Saisons est une claque technique.
L'image de Jacques Perrin, que l'on connaissait superbe dans Océans parvient avec ce film, similaire dans l'approche mais différent dans le ton et le sujet, est ébouriffante. Les plans sont magistraux ; nous est donné à voir l'invisible, à entendre l'imperceptible (le travail sonore qui accompagne les images est immersif et précis, et donc réussi). Ne passe pas une minutes sans que l'on se demande béatement : "Comment ils ont fait ??"
On est là, comme l'était déjà Océans, face à un film, non un documentaire. On est là face à l'histoire, certes vraie, de la nature, de la forêt, de ses évolutions et de celles de ceux qui y habitaient, habitent, habiteront. Hommes, discrets, cachés jusqu'au message final, et Animaux, sujets du film, sont parfaitement distingués; Perrin se refuse à toute forme d'anthropomorphisme, même s'il met véritablement en scène les animaux. Comme dirait Pascal pour critiquer Descartes, on est là face à un "roman de la nature", qu'un montage, une véritable mise en scène, un scénario viennent confirmer.
Alors on pourra penser à la triche, se dire que les animaux nous sont au final présentés avec des émotions qu'un œil humain leur prête, la faute à des plans extraits de leur contexte et montés à l'ensemble, comme dans un lien de causalité. Mais cela confirme là encore qu'on est bien dans un FILM, un vrai, qui se regarde avec distraction (même si les 1h30 du film sont amplement suffisantes ; plus aurait été trop). Jacques Perrin donne son importance à toute la nature, du microscopique au macroscopique, alterne avec jouissance les plans d'une précision infime sur un être de quelques centimètres (comme par exemple ce magistral travelling suivant le vol d'un scarabée, de dos) et les plans de paysages, depuis un hélico. On quitte toute hiérarchie. La course poursuite entre une meute de loup et un troupeau de chevaux sauvages sera toute aussi trépidante que la réaction d'un escargot quand il remarque qu'il se met à pleuvoir.


Mais la fin pèche un peu. Les réalisateurs nous délivre un énième message écologique facile, qui semble de nos jours inévitable. C'est d'autant plus malheureux que la simple beauté du spectacle aurait suffit à éveiller les consciences et à pousser à la protection de cette nature si belle.
Se réveille alors notre sentiment de rébellion face à ce brutal message moralisateur.
Et l'on a envie d'être pas d'accord.
C'est dommage.

Charles Dubois

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