Leviathan
7.1
Leviathan

Documentaire de Lucien Castaing-Taylor et Verena Paravel (2013)

Au bout d'une heure, il y a un plan fixe en plongée sur le pont du bateau qui montre clairement ce qui s'est passé avant, lorsque t'étais jeté par terre, à la place d'un poisson mort, suspendu à la coque, affalé, noyé dans d'interminables mouvements de balancier à trois centimètres de quelque chose de reconnaissable, dans l'oeil d'une Go-Pro où pas un plan ne se veut lisible une seconde et fuit même systématiquement le concept pour retourner à l'état de moule ballotée au gré du tangage du bateau ou du bras d'un pêcheur, giflé par les embruns, le sang et le liquide sans fin vomis du bateau-monstre.

Les dix dernières minutes plus puissantes commencent enfin à vraiment mélanger les 150 heures de rush pour obtenir une caméra tel un être qui passe du ciel au dessous de la mer, en mouvements de chutes suicidaires alternant enfin plus rapidement le montage. Le bateau se mêle aux poissons qui se mêlent aux mouettes à l'envers tous recouverts par la mer elle-même engloutie par le mouvement de la terre vivante. Là, d'accord.

Avant cela, c'est pareil mais en version chiante. On a par exemple quinze minutes d'épluchage de coquilles Saint-Jacques sans jamais le voir avec des coudes en gros plans qui s'agitent dans une mer de flous et d'eau recouvrant constamment les objectifs. Pareil lorsqu'on est attaché aux filets sous l'eau, remonté puis affalé sur le pont, chaque plan est interminable de "vibrez au rythme du monstre vivant". Même lorsque la caméra adopte une vue subjective presque humaine, ça bouge sans arrêt, brusquement, uniquement composé d'extrêmes gros plans, presque toujours de nuit, répétant sans fin que Mer nature est agressive et claustrophobique.

Après la plongée fixe sur le pont et avant le final tant attendu (...), le plan fixe du salon "avec un peu de patience, le pêcheur va s'endormir devant la télé..." sert de repos avec son image nette et fixe enfin sèche, dix bonnes minutes suivies de dix autres minutes face au même gars, dans son cockpit, qui manoeuvre ses filets...

C'est bien joli tout ça, si, si, c'est joli c'est vrai, mais ça se paluche donc de manière insensée. Une caméra qui passe sans cesse d'un magnifique plan de mouettes en contre-plongée à une plongée sous la surface de l'eau illisible si ce n'est pour te recouvrir de matières et de sons liquides, avec une insistance chevronnée de dix bonnes minutes pour chaque plan, ça s'apparente à de la torture dans un sens...
drélium
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le 15 févr. 2014

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