Lifeboat n'est pas très connu, il est un peu perdu dans la filmographie de son auteur, mais il ne pouvait pas être complètement mauvais compte tenu du talent de Hitchcock pour les huis clos.
L'histoire narre les mésaventures de plusieurs personnes se retrouvant sur un canot de sauvetage suite au naufrage de leur bateau, provoqué par un sous-marin allemand. La situation de départ n'est pas des plus heureuses et elle s'envenime quand un soldat ennemi est recueilli à bord de la frêle embarcation. Le film passe par à peu près toutes les situations qu'on peut imaginer avec un synopsis pareil, mais l'ensemble reste intéressant grâce à son propos sur la guerre.
Bien que Lifeboat soit un film de propagande, il ne s'enfonce pas dans un manichéisme facile. En effet, John Steinbeck, le scénariste, a eu l'intelligence de placer l'allemand au centre d'un dilemme, qui est, littéralement, "Est-ce que je peux faire confiance à quelqu'un qui est dans le même bateau que moi ?". Les passagers anglo-saxons seront bien évidemment divisés sur la question, chacun ayant de bonnes raisons de défendre sa position. La confrontation de ces opinions permet d'explorer en profondeurs plusieurs thèmes, comme celui de la confiance ou de la démocratie. Les naufragés faisant progresser leur situation grâce à de nombreuses querelles, négociations et concessions, l'ensemble est lent et parfois un peu redondant. Mais quelque part, ce rythme traduit bien la façon de tourner en rond des personnages en attendant une aide qui ne viendra peut-être jamais.
Le scénario met donc à son service des personnages variés, issus de divers milieux sociaux, et un humour sarcastique de circonstance pour appuyer solidement la réflexion sur la futilité de la guerre. Le réalisateur est parvenu à détourner cette commande de la Twentieth Century Fox afin de se l'approprier complètement. Lifeboat n'a donc rien d'un Hitchcock mineur.
Et de toute façon c'est à voir juste pour le caméo d'Alfred.