Incompréhension : nouvelle déception pour moi face à un film d'Ophüls! Depuis l'époustouflant ravissement ressenti à la découverte du Plaisir, un de mes films préférés, je ne cesse d'être déçu par les autres œuvres de Max Ophüls. La Ronde ne me laisse que peu de souvenirs. 


Et cette Lola Montès qui promettait tant avec un casting de rêve, une restauration photographique et un director's cut, me laisse une nouvelle fois tout penaud, ne comprenant pas vraiment ce qui m'arrive. Peter Ustinov et Martine Carol à l'affiche constituent de belles promesses, certes de natures différentes. 


Peter Ustinov est un acteur sûr et au charme rieur qu'on ne peut décemment mésestimer. Bien de ses participations pimentent les films dans lesquels il joue avec une certaine forme d'impertinence et d'acidité toujours délectables. Or, ici, sa prestation d'animateur de soirée dans un cirque reste plate, sur le même niveau, sans accent ni grande rupture. Il apparaît presque transparent. 


Martine Carol n'est pas une grande comédienne. Elle est ce qu'il est convenu d'appeler une belle actrice, mais son jeu demeure fragile. Bien entendu, on a connu pire. Et même si son jeu très commun convenait parfaitement pour jouer l'ingénunuche qui se fait trousser dans la paille par toutes les bistouquettes révolutionnaires et impériales dans la série Caroline, il n'en est pas de même pour jouer une Lola Montès autrement plus complexe. De la jeune fille naïve, combative à la femme qui vit tristement sur son passé dans un Barnum impudique, il y a là matière à créer un personnage profond, tourmenté, blessé, mais elle ne parvient pas à creuser ce sillon, sans en faire des tonnes, ou au contraire sans paraître vide. L'entre-deux, la nuance n'existent pas dans son jeu. Je le déplore ; j'ai une certaine affection pour l'actrice. 


Et puis, comment passer sous la sous-utilisation d'Anton Walbrook? Pourquoi prendre cet immense acteur et rester loin de son visage si expressif, avec ce regard profond et riche de complexité? Pfff, quel gâchis!


Surtout, cette histoire, ce personnage de Lola Montès m'ont laissé plutôt indifférent. Alors que la mise en scène et la structure auraient dû me passionner, elles m'ont ennuyé. Et perdu parfois, avec des flash-backs perturbants par leur anachronisme.


J'ai été très étonné aussi par le cadrage de certaines scènes. Je citerais en exemple ce plan fixe qui voit un poêle à charbon cacher l'un des personnages pendant un dialogue. Aberrant. Insensé. Je ne comprends pas de manière générale la distance entre les comédiens et la caméra que maintient très souvent Ophüls dans certaines séquences clés, décalage qui estompe l'émotion que le scénario s'échine à mettre en avant par ailleurs. Incohérent encore. 


On a évoqué le scandale qui le film a provoqué à sa sortie : là aussi je suis perdu, je ne vois pas pourquoi... Autre temps, autre mœurs. 


Quoiqu'il en soit, à part quelques beaux mouvements de caméra et pas mal de scènes foisonnantes de détails ne laissant guère de doutes sur l'aisance du réalisateur à produire du grand spectacle et une vraie beauté visuelle, la mise en scène ne réussit pas à mes yeux à sauver le film de l'ennui poli qu'il a suscité jusqu'à son terme.

Alligator
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le 11 avr. 2016

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