Lucy
4.7
Lucy

Film de Luc Besson (2014)

Arrêtez de trop utiliser votre cerveau... et vous apprécierez.

Cela m’attriste de lire tant de critiques de cinéphiles se croyant si « savants » qu’ils jugent Lucy sur sa qualité intellectuelle. Monsieur Besson base, certes, son film sur une citation niaise, celle que « seul 10% du cerveau est utilisé par l’être humain ». J’admets aussi que…
- OK, ce n’est peut-être pas la réalité des choses. En plus de ça, rien ne prouve que cette citation soit bien d’Albert Einstein.
- OK, il n’est pas allé très loin pour chercher son scénario : une nana se fait enfouir un sachet de drogue dans le bide qui se perce et lui procure des espèces de super-pouvoirs en se propageant dans son corps. Elle est poursuivie par des méchants Coréens, on ne sait pas trop pourquoi, et elle rejoint un savant spécialiste du cerveau afin de lui transmettre son savoir.
- OK, il a choisi pour personnage principal Scarlett, celle que tout le monde apprécie, qui attire du monde dans les salles, qui fait l’affiche de pas mal de films cette année ; et pour second rôle le grand Freeman, celui qui n’a plus rien à prouver au monde du cinéma.
- OK, ses plans montrant singes, dinosaures, planètes, cellules et autres formes colorées et indéterminées, rappellent fortement 2001 L’Odyssée de l’Espace ; ceux des courses poursuites et des carambolages de voitures, Taxi ; ceux des coréens au cœur de pierre, le visage couvert de sang, The Place Beyond The Pines ; etc…
- OK, le film expose son intrigue et la résout en 1h30, génériques compris.

Mais enfin, prenez du recul un peu. Vous avez regardé trop de Godard ou quoi ? Pas assez de références historiques, littéraires, philosophiques, métaphysiques, mathématiques pour vous ? Ah, non, peut-être que vous êtes juste vexés, parce que ces références sont simplement bâclées, faussées, biaisées, pas assez creusées… pas assez vraies en somme.

Ah la vérité ! Parlons-en ! Pensiez-vous aller voir un documentaire animalier ? Un documentaire sur l’évolution de l’humanité ? Du cerveau ? Ou sur la formation des planètes ? Dans ce cas-là oui, je comprends votre déception. Or, Lucy est une fiction, ce qui, dans le dictionnaire français Larousse, est défini par une « création de l’imagination ; ce qui n’a qu’une valeur, qu’une réalité de convention ; ce qui est du domaine de l’imaginaire, de l’irréel ». Ne râlez pas, une petite piqure de rappel ne fait pas de mal… Le but d’une fiction n’est pas la vérité, ni la réalité, mais le VRAISEMBLABLE. Ce qui fait l’essence du cinéma de fiction, c’est de nous présenter des choses qui n’existent pas, ne sont pas réelles et ne le seront jamais, et pourtant on y croit. Et je n’ai pas honte de dire que je suis rentrée dedans. Malgré tous les défauts que j’ai reconnus ci-dessus.

S’il-vous plait, abandonnez un peu, rien que l’instant d’un film, vos esprits trop gangrénés par votre quelconque savoir, par votre connaissance d’autre films et d’autres réalisateurs, par votre recherche de l’exactitude de la vérité. Lâchez prise, bon sang ! Les dialogues de Besson ne sont pas la vérité et ne le cherchent pas, mais ils s’imbriquent convenablement. Vous êtes certainement habitués aux 2 heures conventionnelles des films de notre époque, alors un film d’1h30 vous paraît un peu avalé mais mal mâché. Ou même recraché. Moi, j’ai bien inculqué un petit message à la fin : celui de transmettre le savoir, parce qu’en soit, personne ne connait vraiment le sens de notre existence. Oui oui, je sais, vous trouvez ça naïf, bêta, godiche, dindon, cucul, puéril, simplet, nouille, nigaud, benêt… Donnez-moi tous les synonymes possibles, mais je préfère ça plutôt que perdre mon esprit innocent et enfantin face à une fiction.

Luc Besson a sûrement prouvé davantage son talent par le passé. Mais peut-on vraiment lui en vouloir de faire des films que tout le monde peut saisir ? Parce qu’il y arrive, oui : par un montage parallèle peut-être un peu simpliste (la souris qui s’approche du piège lorsque Scarlett se laisse persuader par Richard d’aller livrer la mallette, ou encore les jaguars chassant la gazelle lorsque les Coréens s’emparent de la jeune proie qu’elle représente…) mais efficace, et par la rapidité de celui-ci, ce qui instaure un rythme et une cadence, qui ne laissent pas le film s’enfoncer dans les paroles « scientifiques ». Et alors, ce n’est pas ça, un des buts du cinéma : être accessible à tous ?

Si vous voulez faire marcher vos nombreux neurones à 100% de leur capacité, retournez regarder Arte, ou des films intellectuels et contemplatifs sans saveurs mais « si profonds », ou plongez juste votre nez dans un livre scientifique. Mais, par pitié, ne gâchez pas le plaisir que ressent la plupart du public de ce film, qui, certes, n’est peut-être pas aussi aguerri que vous cinématographiquement parlant, mais se délecte de mettre son cerveau à 0% pendant un instant.
Juliette_Moreau
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le 27 août 2014

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Juliette M

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