Critique : Ma meilleure amie, sa soeur et moi (par Cineshow.fr)

Présenté au dernier Festival du film Américain de Deauville et sorti un peu partout en Europe depuis, Ma meilleure amie, sa sœur et moi arrive enfin en France en cette belle période estivale dominée par le cinéma Américain et les blockbusters en pagaille. C’est avec ce titre pas vraiment original que Lynn Shelton revient au grand écran après un premier essai peu connu du grand public « Humpday », mais ayant suffisamment fait parler de lui pour qu’Yvan Attal n’en fasse un remake il y a peu « Do not disturbed ». Un second long-métrage qu’elle a souhaité aussi proche de la réalité que possible en maintenant ce qu’elle avait déjà entrepris dans le film d’avant, une direction d’acteurs sans dialogues écrits mais uniquement dans l’improvisation. Une manière pour elle de gérer l’action dans l’instant, et de trouver la vérité dans chaque phrase prononcée.

Si les thèmes de l’être perdu (au sens large) font partis de ces marronniers du cinéma indépendant, la manière qu’a de les aborder Lynn Shelton a le mérite de sortir des sentiers battus. En faisant tenir son action dans une maison retranchée dans la forêt, près d’un lac, Ma meilleure amie, sa sœur et moi devient rapidement un huit-clos forestier, où les trois personnages vont se retrouver à vivre un moment charnière de leur existence. Tandis que Jack (Mark Duplass) s’y est retiré pour se couper du monde et vivre le deuil de son frère seul sur l’impulsion d’Iris (Emily Blunt), Hannah (Rosemarie Dewitt) elle s’y rend également pour se remettre de sa rupture avec son ex-petite-amie. La suite semblerait couler de source avec ces deux âmes au fond du trou réunies au sein d’un même endroit isolé. Pourtant, la réalisatrice ne va jamais prendre les chemins éculés et même si par moment elle semble se se laisser aller à quelques facilités, la méthode qu’elle optera ne sera jamais la plus attendue.

Malgré son statut de comédie dramatique indépendante, Ma meilleure amie, sa sœur et moi brasse avec une aisance tout à fait incroyable l’ensemble des thématiques qu’elle aborde mais plus que cela, passe de la feel-good comédie au drame intimiste en jouant en permanence des rapports que les personnages entretiennent aux autres. Leur naturel de jeu est confondant (le fait des dialogues improvisés y est pour beaucoup) à l’instar de leurs traits de caractères et petites faiblesses qui permettent une identification quasi instantanée. Bien que fondamentalement la situation ne soit pas des plus originales, elle se voit traiter avec un tel vernis de vécu que l’accroche est totale, l’empathie absolue et l’intérêt croissant. Un constat assez édifiant pour une réalisation qui n’a rien de très exceptionnelle dans la forme ni dans le fond, mais qui par cette quête perpétuelle d’inscription dans la réalité, et la recherche de personnages par lesquels il est facile de transposer une partie de notre propre réalité, en devient franchement passionnante et touchante.

De rupture de ton en rupture de ton, Ma meilleure amie, sa sœur et moi, évolue au gré de ses personnages, s’orientant un peu plus au carrefour d’une révélation inattendue vers un registre plus dramatique qu’à ses débuts. Une annonce coup de poing qui viendra redéfinir l’ensemble des relations, la notion d’amour et d’amitié. Il est certains qu’avec de pareilles ambitions, le film aurait pu largement viré au pathos et devenir absolument indigeste. Mais la crédibilité des situations même dans ce qu’elles peuvent avoir de plus improbables, et surtout la conviction des trois protagonistes principaux à donner corps à cet instant de vie coupée du monde, confère au film de Lynn Shelton une aura des plus savoureuse. On aime ces personnages, on les aime instantanément, avec leur contradictions, leurs faiblesses, leurs mensonges, leurs différences. Avec cette faculté à saisir l’instant et le bon dialogue, la réalisatrice parvient à insuffler un véritable souffle humoristique sur une situation qui ne l’est pas vraiment, sans jamais concéder au gag inutile ou de circonstance. L’attendu happy-end n’aura donc rien de cliché, et demeure la cerise sur le gâteau d’un film qui part d’un postulat vu des centaines de fois, mais qui par son traitement et son parti pris en décalage se démarque du lot avec les honneurs. Ce ne sera probablement pas le film de l’année mais la fraîcheur qui s’en échappe est salvatrice et le bonheur qu’il procure immense !
mcrucq
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le 2 juil. 2013

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Mathieu  CRUCQ

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