Critique : Machete Kills (par Cineshow.fr)

Adoré par certains, haï par d’autres, Robert Rodriguez est un réalisateur pour le moins clivant, capable du meilleur comme du pire sans que l’on ne comprenne vraiment le sens de sa carrière. Après avoir été lancé sur le devant de la scène grâce à Une nuit en enfer et Desperado, RR s’est autorisé à réaliser une trilogie Spy Kids d’une bien piètre qualité, avant de revenir en 2003 avec Desperado 2, Sin Sity en 2005 et Les Aventures de Shark Boy et Lava Girl la même année. Planète Terreur issu du projet Grindhouse monté avec Quentin Tarantino marquera par la suite un tournant dans la carrière du réalisateur Mexicain sans qu’il ne l’anticipe vraiment, puisque la petite blague innocente placée avant le film, le trailer de Machete, se transforma assez vite en véritable long-métrage devant l’engouement populaire pour le personnage. D’aucuns diront (dont nous) que les meilleures blagues sont évidemment les plus courtes, que Machete n’avait pas besoin d’un développement complet pour rester culte. Le film se révélait ainsi être le résultat exact des prévisions, une bouffonnerie étalée dans la durée, une parodie des nanars vintages dopée à l’hémoglobine factice et aux têtes en caoutchoucs qui volent. Grâce à une brochette de seconds rôles surprenants et quelques extrémités salvatrices, le contrat était quand même partiellement rempli malgré une utilité du film toujours pas évidente. Trois ans plus tard après le succès du premier film (45 millions de dollars de recettes cumulés pour 10,5 millions de budgets de production), nous voici donc devant le film promis dans le générique de Machete, Machete Kills et à nouveau sa panoplie de stars venues de tous horizons.

Réhabilité en tant que sauveur dans le premier film, Machete Cortez reprend ici du service pour ni plus ni moins sauver le monde à la demande d’un Président Américain populiste. Après une introduction sympathique mais moins efficace car moins surprenante que celle de son prédécesseur, les premiers éléments de l’intrigue vont se mettre progressivement en place, laissant voir l’analogie à peine masquée avec les premières aventures d’un certains espion Anglais. Vengeance, trahison, blondes pulpeuses, gadgets électroniques, décors cheaps ornés de lumières clignotante pour faire high-tech, et enfin conquête spatiale, Machete Kills ressemble en tous points à la version Mexicaine et nanardesque de Moonraker. Une comparaison certainement un peu flatteuse pour le film de Rodriguez qui cherche comme le fut le précédent à s’inscrire dans les motifs des films d’exploitations en accumulant sans être trop regardant sur le détail la violence, le sang, le sexe, la drogue, les monstres, bref, tous les tabous d’une société américaine puritaine. Sauf qu’à trop vouloir faire dans l’économie et le clin d’œil, la blague se transforme rapidement en ce qu’elle cherche justement à imiter sans le vouloir, une production elle-même de faible qualité. L’absence volontaire d’une quelconque recherche esthétique, qu’il s’agisse des décors, des effets spéciaux, des combats, et bien évidemment de l’histoire auront raison de l’enthousiasme immense qu’avec su générer la bande-annonce créatrice de tout. Il est dès lors difficile de juger une telle œuvre tant l’ambition de départ d’en faire un produit plus ou moins avarié mais fun est affichée sans complexe, et ce dès le début.

La question qui se pose malgré tout, c’est pourquoi à nouveau étirer sur près d’une heure cinquante une histoire qui bien gérée aurait pu tenir en 1h20. Comme si le concept de blague n’était pas totalement assumé et que derrière une façade cheapouille Robert Rodriguez souhaitait quand même faire sortir un vrai film digne de ce nom. Un véritable problème qui trouva des premiers éléments de réponse dès la présentation par le réalisateur lui-même lors de l’avant-première à laquelle nous avons assisté. Après avoir rappelé la genèse du projet, Rodriguez n’a fait que parler de son idée de Machete Kills in Space (probable troisième film), une idée née lors d’un Comic Con et gangrenant complètement Machete Kills. Car si l’intrigue dudit film converge progressivement vers le délire spatiale, on sent que Rodriguez n’était intéressé dès le début que par envoyer Danny Trejo faire mumuse en apesanteur, et forcément, nous un peu aussi. La fausse bande-annonce précédent Machete Kills étant celle du troisième film, le niveau de surprise est donc poussé à son paroxysme dès les premières minutes avant de revenir sur le même terrain de jeu le terrestre lorsque le véritable film démarre. Fort heureusement, ce qui sauve Machete Kills de sa bascule complète en tant que nanar, c’est l’accumulation de stars composant le casting permettant de compenser le visage mono-expressif de Trejo. Entre Amber Heard toujours aussi pulpeuse, Jessica Alba merveilleuse, Antonio Banderas, Sofia Vergara et ses attributs meurtriers, Vanessa Hudgens, Lady Gaga (trop peu exploitée malgré un personnage intéressant), Michelle Rodriguez et Mel Gibson en bad guy détraqué du bulbe, le film peut compter sur l’effet classique d’empathie artificielle dès lors qu’un visage connu fait son apparition. A ce petit jeu, nous devrons admettre nous être faits nous-mêmes avoir car la manipulation est connue quoi que toujours efficace.

En dépit du fait qu’il soit difficile de défendre Machete Kills tant le concept même du film justifie de faire tout et n’importe quoi (surtout n’importe quoi d’ailleurs) avec l’histoire, le rendu visuel, la direction d’acteurs ou encore le montage, nous devrons avouer avoir quand même avoir bien rigolé à plusieurs reprises, notamment lorsque le film se libère des vannes déjà utilisées dans le premier opus pour partir complètement en vrille. Moins violent que ce à quoi l’on pouvait s’attendre, moins sale et « redneck » que pouvait l’être Planète Terreur, Machete Kills est une sorte de version mainstream du film d’exploitation, un paradoxe qui saura à n’en pas douter attirer les foudres des détracteurs de Rodriguez, mais qui n’empêchera pas malgré tout de passer une bonne soirée pizzas-bières devant lui. Il faudra toutefois garder en tête que cette suite n’est qu’une simple transition avant une troisième aventure dans les recoins de la galaxie, un tremplin qui aurait en fait gagné à n’être qu’une introduction avant une aventure barrée, et non un long-métrage à lui seul. Mi-figue mi-raisin comme dirait l’autre…
mcrucq
5
Écrit par

Créée

le 23 sept. 2013

Critique lue 1K fois

16 j'aime

Mathieu  CRUCQ

Écrit par

Critique lue 1K fois

16

D'autres avis sur Machete Kills

Machete Kills
Sergent_Pepper
3

Les théories de la réception

Extraits de conversation entendue dans la cours de récréation du collège Francis Lalane, le 25/01/2014, entre Kevin et Enzo. - ouais, et quand il balance les tripes du mec dans les pales...

le 29 janv. 2014

50 j'aime

13

Machete Kills
SanFelice
6

Une affaire de coeur

Après tout, au centre du film Machete Kills, il y a un cœur. Et tous les problèmes qui vont avec. Avant de le regarder, assurez-vous que vous n'avez pas un cœur d'artichaut et que vous avez le cœur...

le 28 janv. 2014

35 j'aime

8

Machete Kills
Paradox
7

Tu la préfères plutôt classique, ou plutôt gangster ? Alors classique, ou gangster ?

Machete, c’est l’OVNI de ce mois de septembre. Salle minuscule, quasiment vide, une fausse pub avec effet vieille péloche, ouais, on y est, après vingt minutes de publicité, le film peut démarrer et...

le 3 oct. 2013

27 j'aime

5

Du même critique

Expendables 2 : Unité spéciale
mcrucq
8

Critique : Expendables 2 (par Cineshow)

Lorsque le projet Expendables 1 avait été annoncé il y a maintenant plusieurs années grâce à l’impulsion de Sly, la testostérone de tous les afficionados de films d’action des années 80 avait...

le 12 août 2012

82 j'aime

12

Taken 2
mcrucq
2

Critique : Taken 2 (par Cineshow)

Avec son budget de 25 millions de dollars ayant engendré 226 millions de dollars de recette, Taken premier du nom avait créé la surprise à l’international en atomisant la concurrence, et en se...

le 9 sept. 2012

53 j'aime

12

Django Unchained
mcrucq
9

Critique : Django Unchained (par Cineshow.fr)

Il aura fallu presque 20 ans à Quentin Tarantino pour réaliser son western, celui qui hante l’ensemble de sa carrière, et celui qu’il évoque de manière subliminale dans chacun de ses films. Après...

le 19 déc. 2012

52 j'aime

6