Rarement un film n'aura si bien porté son nom. Par sa maîtrise, son inventivité constante et son univers brut, George Miller donne une vraie leçon de cinéma d'action à tous les cinéastes actuels oeuvrant dans ce genre balisé. Quelle tristesse de voir avant le film toutes ces bandes annonces abominables de Terminator Genebeurk, San Scenarias, et Jurassic Prout... Et quelle satisfaction de voir enfin un film d'action qui non seulement s'assume comme tel, mais ne s'arrête pas à ça.
Comme à l'accoutumé, Max est le personnage principal mais pas vraiment, ici il reste effacé pendant une grande partie de film derrière Furiosa (Charlize Theron). D'ailleurs, à plusieurs reprises il lui laissera les honneurs. Max subit son destin, et bien qu'il s'en sorte à chaque fois, il n'est jamais héroïque, au sens chevalresque du terme, il agit pour lui avant tout... Le côté volontairement archétypal des personnages les réduit à leur simple quête de survie, et les codes, les relations sociales que nous connaissons ont disparus et laissant place à des rites plus tribaux. Quelque chose de brut et dingue.


... Mais c'était trop beau pour être vrai : le dernier quart du film retombe dans les sentiers balisés hollywoodiens


SPOILERS


C'est particulièrement décevant, car on espère bien plus quand on voit le côté déjanté assumé de tout le reste du film, ce sentiment de détresse, d'inéluctabilité. Mais Max, plutôt que de rester relativement passif dans ses choix, va faire celui de prendre les choses à bras le corps. Comme dans le premier Mad Max à priori, sauf que le propos est tout autre :
Dans le premier Mad Max, lorsqu'il décide de ne plus subir, il part tuer, se venger. C'est moralement crade, aucun héroïsme là dedans, c'est juste cathartique. Dans fury road il aurait pu partir de son côté, mais il décide plutôt d'être schwarzy, de risquer sa vie pour le bien d'autrui, juste au moment où le film aurait pu s'arrêter, laissant une fin ouverte douce-amère au film... C'est ultra moral et balisé, le retour de l'héroïsme triomphant à l'américaine.
Après ce n'est pas fondamentalement mauvais, l'idée du retour en soit est pas mal car il y a toute une symbolique derrière, mais c'est plus la manière dont c'est fait qui devient balisé.


FIN SPOILERS


Le film est aussi très féministe, ce qui est déjà en l'état assez surprenant dans un film d'action américain, mais surtout dans un film d'un genre qui -à priori- n'est pas destiné au public féminin. Mais c'est là que le "message" est le plus pertinent : chez le public masculin. Ce côté féministe transparait dans plusieurs scènes du film, mais aussi par le fait que c'est Furiosa semble être le personnage principal. Mais surtout avec ces femmes à sauver qui ne sont pas que de simples bombasses en détresses, elles sont les plus cultivées du film, et ne restent pas toujours mollement là à se blottir, certaines agissent avec courage, mais on sent qu'elles n'ont pas l'habitude : elles ne sont pas badass. C'est amusant parce que je me suis dit à un moment que si Max aidait ces filles c'était peut-etre aussi en souvenir de sa femme assassinée. Mais en réalité c'est une fillette qui vient le hanter régulièrement, pas sa femme. Même là où le film pourrait trouver une justification au choix de Max, il préfère ne pas donner d'explication, laissant ce geste, comme le rôle des femmes dans le film, dans le domaine du symbolique. C'est moins codifié "hollywood" que ce à quoi on pourrait s'attendre quand on les voit pour la première fois dans leur tenues sexy, mais là où le grand méchant du film (qui incarne le système, et donc allégoriquement le système hollywoodien) les réduisait à leur dimension sexuelle et leur rôle de "pondeuses" (le terme utilisé dans le film lui-même), elles s'émancipent et on ne peut que constater qu'elles sont des personnes bien plus libres de penser que tous ces hommes fanatisés qui suivent Immortan Joe dans sa quête.
D'ailleurs, ce fanatisme, ce sentiment de folie furieuse (d'où le fury road) qui transcende le film, est confronté, lors de courts moments à certaines séquences intimes, limites poétiques qui confère -encore une fois- à ce Mad Max une aura bien particulière, qui en fait au final, une expérience cinématographique rare, jouissive, et même un petit peu plus.


Critique en vidéo (vlog) : https://youtu.be/2GPUDCeXbRI

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le 15 mai 2015

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Loïc Massaïa

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