On a tous déjà rêvé de sortir l’idée du siècle. Naïvement, certains continue d’y croire après 30 ans et sont même prêt à tout quitter ; femme et boulot ; pour se consacrer pleinement à la concrétisation de leurs fantasmes. Mais la plupart reviennent bredouille, la queue entre les jambes, déçu de leur expérience puisqu’il ne suffit pas seulement d’une bonne volonté, cela demande aussi du talent, de la réflexion, une perpétuelle remise en question, beaucoup de préparation, et surtout de travailler sans relâche et sans aucune garantie de succès. Cédric Dupuis n’a rien d’un génie et appartient bien à cette catégorie de personne superficielle obnubilé par l’idée de réussir à tout prix. Il n’a vu dans l’horreur qu’une occasion d’accession vers le top, une opportunité de s’affranchir enfin de sa condition de prolot et de confier la rénovation de sa maison aux soins d’une bande de margoulins une fois qu’il serai devenu riche et célèbre et qu’il pourra enfin chier sur le monde en vivotant d’une réputation de metteur en scène. Un idéal que poursuive d’ailleurs beaucoup de clampins en s’inscrivant prétentieusement en école de cinéma avec l’argent de papa-maman. Comme toute personne mégalo, il nous annonce en trombe qu’il va réaliser le plus grand film d’horreur de tous les temps, rien que ça, et ce sans même avoir pris la peine d’effectuer des recherches, ou bien d’avoir vu quelques films de genre qui aurait pu lui insuffler les idées nécessaire à l’élaboration de son scénario qui se limite ici à ces émissions du lundi matin type Petits Secrets entre voisins. Rien d’étonnant quant on sait que l’inspiration derrière le projet ne se situe pas dans la nouvelle vague de Found Footage envahissant le marché mais plutôt proche de C’est arrivée près de chez vous.
Non content de vouloir révolutionner le 7ème art, il veut aussi tourner le meilleur making off de l’histoire. Même pour ses amis, il est tout de même très difficile de le prendre au sérieux, d’autant que sa mise en scène est aussi brut de décoffrage que son speech ou son montage. Il a donc investit ses derniers ronds dans un caméscope, et se lance dans un tournage totalement amateur et improvisé avec ses copains qu’il rend responsable de la faiblesse de ses dialogues surjoués ou bien clamés sans ardeur. Le reste est à l’avenant, une photographie terne sans éclairage, sans artifice, sans prétention, des décors banal d’appartement, un découpage effectué à la truelle, des faux raccord, une très mauvaise utilisation de la musique extra-diégétique, aucune inventivité dans le déroulement, quant à l’action, celle-ci est cadré n’importe comment. Sans surprise, les rush ne donnent rien une fois passé la table de montage, pas même avec l’ajout vulgaire et cheap d’un filtre visant à détériorer l’image pour donner l’allure d’un vieux film d’exploitation. Evidemment, cet échec permanent va accentuer les tensions et avoir le don d’exacerber le réalisateur qui va très rapidement griller son dernier fusible et tuer sa copine qu’il soupçonne de coucher avec l’un de ses acteurs avant de s’en prendre à l’ensemble de son entourage qu’il va décimer avec la parfaite panoplie du bricoleur.
Passé la première partie qui laissait présager le pire malgré son propos assez cynique, Making Off devient drôle. Mieux il devient même divertissant malgré l’étroitesse de son concept et la faiblesse de ses effets et ce grâce à l’humour de son interprète et à quelques délires totalement assumés comme la dégustation d’une merde issue d’un gros intestin, la trépanation d'un cerveau à coup de bite, une poignée de jump-scare totalement scabreux, une beat box simulé à coup de marteaux, et surtout un humour noir omniprésent souvent grotesque, souligné par un champ lexical vulgaire à l’esprit bien franchouillard et limite plus percutant que l’ensemble des sévices infligés et coup de ponceuse flanqués à la gueule de ses copains numériquement ou bien hors champ. Le réalisateur prend également le soin de soigner son fil conducteur qui consiste à violer toutes ses victimes ; hommes, femmes ou animaux ; pour pimenter son oeuvre, et la sauver du naufrage artistique total afin de contenter le voyeurisme du spectateur qu'il assène parfois de "cours" de cinéma et d'un glossaire explicatif digne des nuls. Alors, il faut bien le prendre pour ce qu’il est, une comédie satirique, plus qu’une véritable mise en abyme du genre. Un film de petit malin assez pingre en effet gore, et esquissant un portrait assez grossier d’un pervers narcissique atteint d’une crise de tuerie passagère. Au moins la faute n’est pas à rejeter sur le cinéma ou les jeux-vidéos. S’il tue, c’est uniquement parce qu’il le veut bien et que cela lui permettra de devenir célèbre comme un certain Luka Rocco Magnotta dont les actes ignobles lui feront écho puisqu’ils seront commis exactement 4 semaines après la sortie du film en salle...