Le premier film de Mathieu Amalric fait partie de ces œuvres qui initient une filmographie (de réalisateur) sous l'angle de l'autobiographie. La mère, le frère, la sœur, ainsi sont désignés les personnages privés de noms, comme par souci de généralisation. Les ambitions sont à la fois claires, explicites, sommaires, et un peu trop auto-démonstratives : c'est le récit d'un homme qui vivait à l'étranger avant de retourner chez sa mère, dans la maison de laquelle il va se retrouver comme pris au piège, prisonnier de montagnes de livres (elle est critique littéraire) qui menacent sans cesse de s'écrouler et d'emmurer vivant toute la maisonnée. Comme souvent avec Amalric de l'autre côté de la caméra, côté mise en scène, l'action reste comme vaporeuse, floconneuse, volontairement imprécise : ici, cela se manifeste par les relations entre la mère et son fils, clairement dégradées et tendues, mais jamais parfaitement connues. On apprend qu'un autre frère est mort : il s'est suicidé, et tout le film pourrait se lire à la lumière de cet événement, à savoir comment tous les personnages se sont reconstitués autour du décès.
Il est beaucoup question d'univers étouffant (le père a fui cet univers pour ces raisons, vraisemblablement), mais toujours avec cette très légère note burlesque qu'on retrouvera souvent chez Amalric. Mais ce sont les névroses de la mère qui sont affichées et mises en avant, ne serait-ce qu'en se concentrant sur la séquence finale, mais aussi dans cette maison familiale qui ressemble à s'y méprendre à l'antre d'une bête hostile. Un film de survie, donc, suite à la mort d'un frère et d'un fils, avec des relations impossibles entre plusieurs membres de la famille. Pour le fils, il sera question de faire le ménage, dans tous les sens du terme, et si ses gestes sont dépeints avec une certaine bienveillance de façade, ils n'en contiennent pas moins une petite dose d'acidité, en jouant régulièrement la carte du malaise diffus qu'on ne voit pas venir. Il finit même par y avoir une certaine forme d'angoisse qui émerge de ce terreau constitué d'absurde.