A chaque découverte d'un film thaïlandais, la tentation est grande de le juger à l'aune du cinéma de Weerasethakul, le maître-étalon en la matière. Dans le cas de Manta Ray, la comparaison a du sens puisque le réalisateur fait partie des influences avouées de Phuttiphong Aroonpheng au même titre que Lynch ou Tarkovski. Dédié aux martyrs Rohingyas, Manta Ray nous plonge d'emblée dans une atmosphère de réalisme magique où il s'agit moins de comprendre les tenants et les aboutissants d'une histoire que de ressentir une atmosphère vaporeuse, entre eau et forêt, dont certaines scènes resteront inexpliquées. Un cinéma très esthétique, peut-être un peu poseur parfois, mais fascinant et assez imprévisible dans un récit qui ne livre que peu d''indices. On y aperçoit pourtant une sorte de triangle amoureux entre un personnage muet, moribond lorsqu'il est découvert, un pêcheur énigmatique et la femme qui a quitté ce dernier. Malgré un dernier quart d'heure qui s'enveloppe d'un mystère intégral, le film parvient à nous intriguer et à nous faire flotter entre rêve et réalité, entre politique et poétique, porté par une mise en scène attentive aux bruits de la nature et à l'empreinte souvent nuisible qu'y déposent les hommes. Si l'on reste assez circonspect et à moitié séduit durant sa projection, Manta Ray fait partie de ces oeuvres qui laissent une trace durable dans une mémoire de cinéphile.

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le 28 juil. 2019

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