Maryland se pose d’emblée en thriller halluciné en braquant sa caméra sur son personnage principal, un soldat trimbalant un lourd stress post-traumatique au retour du front. Vincent ne quitte pas une seconde l’écran, la réalisatrice jouant à fond sur ses troubles psychiques pour accentuer le sentiment de malaise et renforcer l’ambiguïté entre réel et hallucination, danger et délire parano.
L’idée aurait été bonne si elle nous avait été présentée avec un peu plus de finesse. Malgré un charisme évident, Matthias Schoenaerts n’a pas grand-chose à défendre et recycle ses personnages bourrus à la violence contenue. Le problème ici est qu’à part le cliché du soldat revenant du combat, on n’apprend pas grand-chose d’autre sur lui. L’absence d’épaisseur est encore plus marquée pour le personnage de Diane Kruger, qui doit se contenter de faire joli dans le décor.
La réalisatrice semble s’être perdue dans sa volonté de créer un objet compact, immédiat et sans fioriture. A force de jouer d’ellipses et de suggestions, de vouloir en dire le moins possible, on prend le risque de perdre son spectateur et c’est exactement ce qui se passe avec Maryland.
Des personnages sans background, grossièrement définis par deux ou trois traits de caractère à la limite de la caricature et une intrigue nébuleuse et trop floue jouant uniquement sur des allusions rendent le film de Alice Winocour malaisé à suivre, si bien que l’intérêt finit par rapidement s’estomper. En fait on s’en moque un peu de ce qui se passe dans cette baraque…
Maryland tourne à vide malgré les tentatives de mise en scène pour créer un climat instable et angoissant, caméra à l’épaule, musique anxiogène, mais les effets sont si peu subtils qu’ils ne font que sur-appuyer un propos pourtant peu lisible. Cette tension artificiellement amplifiée ne cache pas le manque de fond de Maryland, le peu de relief des personnages et la vacuité de l’intrigue. C’est au final ronflant, et on se demande vraiment ce que la réalisatrice a bien voulu nous dire ou nous montrer à part le fait qu’elle savait utiliser une caméra (ce qui est le cas).
Dommage, parce que l’idée de ce survival minimaliste en huis clos aurait pu s’avérer intéressante si elle avait été traitée avec un peu plus de modestie et bénéficié d’un travail plus abouti sur le scénario.

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le 8 oct. 2015

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