Le stop-motion de garage ravive en moi plusieurs souvenirs inavouables ! Enfin quand je dis « de garage », je suis tout de même étonné de la longueur du générique et du nombre de personnes ayant collaboré au film. La post-production a sans doute été plus conséquente que ce à quoi l’on pouvait s’attendre.
Maya, donne-moi un titre est un film tout mignon d’à peine une heure, réalisé par Papa, aka Michel Gondry. Bien qu’on connaisse Papa surtout pour son travail de réalisation – avec les excellents et très variés Eternal Sunshine of the Spotless Mind, Soyez sympas, rembobinez, L’Ecume des jours, ou l’américain The Green Hornet) – il faut savoir que Gondry est également musicien et auteur de bandes dessinées.
Son amour pour la fabrication avec des bouts de ficelles transparait dans toute son œuvre : dans Soyez sympas, rembobinez, ce sont deux loueurs de K7 qui effacent par erreur toutes les vidéos et qui s’attèlent à refaire chaque film avec les moyens du bord. Dans le plus récent Le Livre des solutions, c’est au tour de Pierre Niney de tenter de terminer un film avec ses ressources limitées, de manière artisanale.
Dans Maya, donne-moi un titre, Gondry commence par nous présenter son dispositif, d’abord tout à fait archaïque, puis qui s’étoffe un peu avec l’achat d’un appareil photo permettant de créer un stop motion en 12 images / seconde.
La fabrication du film (et c’est bien normal pour un long métrage en stop-motion) s’est étalée sur plusieurs années. Michel Gondry a commencé à concevoir un petit film animé pour l’anniversaire des 3 ans de sa fille Maya. Puis, la tradition s’est installée et à chaque bouclage d’histoire, le cinéaste lui demandait le titre du film suivant. Gondry explique : « J’intégrais des personnages de sa vie quotidienne : ses grands-parents, son chat, sa maman. Je faisais dériver son quotidien vers le fantastique. C’était comme une histoire au coucher : sa maman lui lisait les titres et les dialogues puis elle me faisait des retours sur les réactions de Maya ». Maya, donne-moi un titre a été terminé pendant le confinement, alors que le cinéaste était loin de sa famille, aux Etats-Unis.
De facto, Maya donne-moi un titre s’apparente davantage à un programme de courts métrages pour enfants, comme ceux que l’on voit régulièrement au cinéma, dans le cadre des séances pour les tous petits (le film de Gondry m’a fait penser aux programmes venus de République Tchèque, qui est d’ailleurs l’un des pays leader en matière de cinéma stop-motion pour bambins). Gageons que le film aurait eu une carrière beaucoup plus importante s’il avait été sorti par un distributeur habitué à ce genre de programme, à l’image de KMBO, Cinéma Publics Films, ou Les films du Préau. Malheureusement, sous bannière The Jokers (plutôt spécialisé en thrillers et films horrifiques), le long métrage n’a connu qu’une carrière limitée, dépassant tout juste les 20 000 entrées. C’est dommage car Maya, donne-moi un titre avait toutes les qualités pour faire un carton auprès des tous petits.
La voix off (qui lit les différents cartons apparaissant ça et là à l’image) est l’un des points forts du film. On reconnait bien sûr aux premiers dialogues les intonations si particulières de Pierre Niney. Michel Gondry a profité de la présence de son filleul (oui, le monde est petit !) sur le tournage du Livre des Solutions pour enregistrer la narration. Blanche Gardin était également présente sur le film, et comme il ne faut pas de jaloux, Gondry a déjà prévu un autre film où la narration serait assurée par elle !
Certains lisent des histoires à leurs enfants le soir. Gondry, lui, les filme ! Bien que parfois quelque peu répétitif, Maya, donne-moi un titre est bourré d’inventivité. Les mini-histoires frisent souvent avec le fantastique, dans une imagination totalement débridée. C’est mignon, c’est touchant, c’est artisanal.