Mercenaire propose de remonter aux fondements de la société wallisienne en adoptant le motif de la boucle : un jeune homme quitte son foyer et la violence qui le caractérise pour renaître en France mais, parce qu’il y trouve une violence similaire – l’équipe de baseball est définie comme une famille, et les joueurs comme des frères –, doit revenir au pays, mourir et renaître en implorant son père avant de lui succéder. Soane est sans le savoir porteur de la violence qu’il fuit, gravée en lui par des tatouages qui le raccordent à son histoire familiale, à son hérédité ; ses altercations se transforment en scènes de boucherie alors que son visage à lui paraît doux et posé, celui d’un gros nounours. C’est cette tension entre apparence physique et rage intérieure que le long métrage de Sacha Wolff capte le mieux, aidé en cela par la prestation de l’acteur principal, Toki Pilioko, tout simplement excellent.
Mais le propos ne saurait combler la faiblesse d’une mise en scène qui manque de force : constamment prise entre deux eaux, elle aimerait se faire documentaire et esthétique à la fois, débouche donc sur une bipolarité malheureuse parce que figée. Nous avons l’impression que la caméra ne sait pas quoi faire de son personnage : impressionnée par son corps, fascinée peut-être par sa carrure, elle le contraint à l’immobilisme et à la lourdeur, sans incarner à son tour son dilemme, soit la lutte entre l’emprise d’une violence écrite et la libération que confèrent temporairement les paradis illusoires – la France, la nouvelle équipe, la romance amoureuse qui devient mariage. En résulte un film inégal et anecdotique qui a toutefois deux mérites : celui de révéler un acteur, celui de représenter une culture trop absente de nos écrans de cinéma.