Tonya Harding, sa vie, son oeuvre. A première vue, cela ne m'intéresse pas, surtout que la patinage artistique me laisse de glace. Comme souvent, ce sont les critiques dithyrambiques à son encontre, qui me donne envie de découvrir ce film, avec aussi le ton qui semble être celui de la comédie caustique avec une pointe de cynisme. Cela devrait me satisfaire.


En attendant l'incident. Tonya Harding (Margot Robbie) n'est pas dupe quand à la présence du public dans la salle. Elle sait très bien, qu'il est là pour la raison qui l'a fait connaître au-delà du patinage artistique, à savoir l'agression de Nancy Kerrigan (Caitlin Carver). Avant d'en arriver à ce moment tragique, on va revenir aux racines du mal.


Tonya est une petite fille de 3 ans, ne rêvant que de patiner. Sa mère LaVona (Allison Janney) va réaliser son souhait, en l'amenant à la patinoire et en imposant la présence de son enfant aux entraînements, malgré son jeune âge. Une mère qui se révèle autoritaire, intrusive et violente. Une attitude qui va pousser le père de Tonya, a quitté le foyer familial, abandonnant sa fille aux mains de cette femme tyrannique. Elle va grandir dans la violence, en continuant d'assouvir sa passion, de grimper les marches menant aux plus hautes marches du podium, avant une chute fatale, qui va faire d'elle, la femme la plus détestée des Etats-Unis, voir du monde.


L'histoire est celle de Tonya Harding, mais c'est aussi celle de son ex-mari Jeff Gillooly (Sebastian Stan). Ils nous racontent leurs vies, chacun de leurs côtés, ce qui permet d'avoir un point de vue différent sur l'évolution de leur relation, puis du drame. Après avoir grandit auprès d'une mère violente, jusqu'à ce qu'un couteau clôt leur relation. Elle s'installe puis se marie avec Jeff, un homme violent et possessif. Selon lui, elle était aussi violente. La vérité se trouve sûrement dans les rapports de police, auprès desquels, Tonya va régulièrement faire appel, puis obtenir des ordonnances restrictives, ce qui n'est pas anodin. La violence fait partie du quotidien de la jeune femme, depuis sa tendre enfance. Elle ne connaît que cela et pense que c'est la normalité. De ce fait, elle reproduit le schéma dans lequel elle a grandi, ce qui ne fait pas forcément d'elle une victime.


En se rendant à la séance, j'avais un apriori sur Tonya Harding. Il faut dire qu'elle est sujet à plaisanterie depuis l'incident, mais pas seulement. C'est une enfant de l’Amérique profonde, plus précisément, une redneck. Dans l'univers du patinage artistique, son attitude détonne. A titre d'exemple, Philippe Candeloro est sa version masculine, ce qui n'est franchement pas un compliment. Elle confectionne elle-même ses tenues, dont le kitsch ne ravit pas les juges, tout comme la musique hard-rock accompagnant ses programmes. Ces excès de colère et son insolence, n'arrange pas son cas. Son entourage ne lui est pas d'une grande aide et la tire vers le bas. Pour autant, on ne peut pas être en empathie avec elle, même si on comprend la difficulté de sa vie. Il faut dire qu'elle fait constamment preuve de mauvaise foi face à la caméra, assise dans sa cuisine, une cigarette et la main, en évoquant son passé. Cela arrache des sourires, comme lorsqu'on se retrouve en présence de sa mère et de son perroquet. La fille est entrain de devenir le portrait de sa mère, ce qui n'est pas très flatteur. On s'amuse de leurs relations, mais on va vraiment se régaler grâce à l'ami de son mari Shawn Eckhardt (Paul Walter Hauser).


La chute de Tonya Harding va principalement être causer par Shawn Eckhardt, qui est le meilleur ami de son mari Jeff Gillooly. Le jeune homme vit dans le sous-sol de ses parents, mais affirme avoir été un agent du renseignement, où un truc comme ça, dans divers pays du monde. Bref, c'est un mythomane au physique ingrat. Sa stupidité n'a d'égale que sa faculté à mentir, même face à la vérité. Comme Tonya, il s'est entouré d'une équipe de bras cassés. On a le sentiment d'être tombé sur un élevage d'imbéciles. Cela ne serait pas très grave, s'ils n'étaient pas des plus dangereux. La violence reste leur seul moyen de communication et à tout moment, ça peut déraper et cela va d'ailleurs être le cas. On se demande comment Tonya peut encore être en vie, en ayant côtoyé des énergumènes pareils, en se retrouvant constamment en danger face à un couteau, un revolver et des poings. On se dit presque, que finalement, elle s'en est bien sortie.


Moi, Tonya est à la fois, férocement drôle et dramatique, avec une belle galerie de pieds nickelés, sublimée par leurs interprètes. Margot Robbie, Allison Janney et Paul Walter Hauser sont remarquables. Le film ne change pas la perception du public à l'égard de Tonya Harding, mais nous éclaire sur la difficulté de sa vie. Pour autant, cela n'excuse pas l'incident. C'est une bonne surprise, où même les scènes de patinage artistique m'ont passionné, avec le fameux triple axel, dont elle fût la première à l'exécuter en compétition professionnelle. Elle aura marqué ce sport, mais aussi les faits divers. Un destin tragique, pour une petite fille qui ne rêvait que de patiner sur la glace.

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le 28 févr. 2018

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5 j'aime

Laurent Doe

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