Duncan Jones. Si ce nom de vous dit sûrement rien c'est qu'il est encore méconnu du monde du cinéma, c'est que ce jeune réalisateur n'en est qu'à sa deuxième réalisation (Moon, 2009 et le récent Source Code, 2011) et, fort de les avoir toutes réussites, se targue parallèlement de n'être tout simplement que le fils de David Bowie himself. Une révélation surprenante qui ne doit pas masquer le talent incontestable de ce fils de rockstar pour la réalisation. A l'inverse du blockbuster SF Source Code arrivé en salle début 2011, Moon ne connu pas ce bonheur, le film sortit ainsi directement en DVD courant 2009. Il faut dire qu'avec un budget misérable de 5 millions de dollars et un statut de film dit «indépendant» Moon fait davantage office d'anti-blockbuster modèle que d'un véritable produit commerciale. Jones ne dû son salut qu'à travers la campagne de promotion qu'il égraina de festivals en festivals, gagnant ainsi de nombreux prix à travers toute l'Angleterre. Un succès mérité pour une uvre que l'on jugera étonnante, énigmatique, hors du temps, dont le scénario provient directement de l'imaginaire du cinéaste, un point important qui ne fera que souligner les différentes prises de risques que peut se prévaloir cette surprenante série B aux forts accents SF.
Moon raconte l'histoire de Sam Bell, un astronaute séjournant seul sur la Lune dans une optique bien claire : veiller au bon fonctionnement de la base Lunar industrie, une entreprise énergétique alimentant la terre via l'utilisation des ressources de l'orbite terrestre. Arrivé au terme de son contrat de 3 ans, Sam voit dès lors des hallucinations lui apparaître. Une intrigue sujette, à l'instar de Source Code, à une réflexion psychologique et pertinente sur le rôle du cobaye dans notre société, une méditation avant gardiste qui en fait le film ovni par excellence. De ce fait, à plusieurs égards, Moon est l'archétype de ce qui se doit de figurer dans les bouquins d'écoles de cinéma au chapitre : « réussir quand on a rien ». En effet, Jones réussit le pari de rendre attractif les aventures de son unique personnage (impressionnant Sam Rockwell) dans un décor minimaliste et réducteur, une performance qui doit à l'exploitation de chacune des composantes du film, authentique exercice de style au charme et au visuel enivrant, lunaire.
On est comme embarqué dans ce huit clos spatiale aux allures Kubrickiennes (2001 notamment) où tout est exacerbé : sentiments, compassion, empathie, un choix de mise en scène inhérent à l'affection des personnages (qui aurait cru qu'un robot à tête de smiley puisse être si attachant). La mise en scène, justement, souffre parfois d'une direction maladroite, d'une incohérence de situation, ce que l'on voit à l'image n'est pas toujours raccord avec les codes habituels du cinéma (les effets de surprises notamment), et on s'étonne parfois là où il n'y a pas lieu d'être. Un défaut relativement peu gênant à côté d'une maîtrise globale incontestable de la part du cinéaste, tel la musique de Clint Mansell (la BO de Requiem for a dream, c'est lui) qui fait merveille à toute instant, tout autant que la photographie, très lunaire, fantastique, voir onirique. Duncan Jones surprend tout le monde là où on s'y attendait le moins, ce fils de star planétaire initie son propre parcours avec un brio et une totale maîtrise de son art, un homme à suivre.
Déroutant, brillant, expérimental, Moon est un bijou d'écriture et de style cinématographique qui vaut l'approbation du bouche à oreille, et ce, non seulement pour la performance de Sam Rockwell, mais pour l'audace et l'originalité dont peut se vanter cet objet filmique décidément loin de faire comme les autres.