Huis-clos à l'espagnole

Nan mais c'est quoi cette moyenne, les gens ? Vous êtes sûrs qu'on a vu le même film ? On parle bien de ce petit bijou ibérique, cette pépite singulière qui fait d'une plongée psychanalytique dans une famille à légers problèmes un thriller époustouflant ?

Shrew's nest, c'est 1h30 passées dans l'appartement de Montse, une très pieuse jeune femme, très marquée par un père toxique, et sa jeune soeur qu'elle a élevée comme sa propre fille depuis la mort de sa mère à sa naissance. Montse se terre dans son nid, n'osant jamais franchir le seuil de chez elle ; l'actrice qui l'incarne est incroyable et offre un visage fou, mélancolique et défait à la caméra tout au long du film. Sa soeur rappelle l'actrice principale de Downton Abbey, dans sa beauté pâle et gracile : toutes deux sont formidables et portent littéralement ce film étrange et dérangeant qui n'est autre qu'une forme de huis-clos théâtral où tout peut basculer à chaque instant.

Montse est couturière, elle reçoit parfois la visite d'une riche cliente qui la fournit en morphine sous le manteau : le souci, c'est que la jeune femme est droguée, et que son mal - mystérieux - ne fait qu'empirer avec cet antidote désastreux.

Le duo des soeurs va rapidement être bouleversé par l'arrivée de Carlos, le voisin du dessus qui, blessé en dévalant l'escalier, trouve refuge chez les jeunes femmes.

Le film m'a parfois rappelé Misery - et vous comprendrez pourquoi quand vous l'aurez vu. On sent que l'atmosphère pesante va rapidement tourner au cauchemar, que les démons tapis dans l'ombre de l'appartement, les fantômes du passé, ne vont pas tarder à surgir...

Autant prévenir : certaines scènes sont d'une violence radicale et risquent d'en choquer plus d'un. Mais c'est pour moi l'une des forces principales de ce film : son aspect sans concessions, qui va jusqu'au bout de son propos, quitte à franchir les lignes de la vraisemblance.

Qu'importe, le climat est tendu à l'extrême, rien ne nous est épargné et les révélations finales laissent bouche bée. Les acteurs sont intenses, la mise en scène, qui s'appuie intelligemment sur les couloirs, les lumières, les cachettes, est totalement maîtrisée, la violence est explosive, la douleur psychologique, l'esprit vengeur, parfaitement rendus : bref, Shrew's nest mérite des lauriers bien plus brillants que ceux que vous lui décernez, excusez du peu !

Singulier, cruel, émouvant, haletant : voilà des qualificatifs qui collent à cet excellent film qui mérite clairement le détour !